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qui se noie tend les bras vers un ennemi. Comment attendre le relèvement de la patrie des partis nationaux occupés durant des années à s’entre-déchirer cruellement ?

Pour débarrasser le pays de ses méthodes archaïques et de sa corruption, il faut, avant tout, former la génération qui se lève. Les matériaux sont bons. Durant mes voyages, j’ai visité des institutions de tout ordre où grandissent les enfans coréens : orphelinats de mission, écoles primaires et fort primitives des villages, établissemens étrangers où sont enseignées les langues européennes, séminaires. En majorité, les élèves sont bien au niveau des études qu’ils entreprennent. J’ai vu des garçons témoigner, en latin, en mathématiques par exemple, de connaissances aussi sûres que celles de leurs camarades européens. Le goût des questions métaphysiques est même très remarquable chez les étudians appelés à suivre des cours plus élevés : l’aptitude à spéculer, atavique chez les Chinois et les Indiens, se révèle également chez les Coréens. Le développement moral est tout aussi satisfaisant. Naturellement dociles, les jeunes gens restent fidèles aux principes reçus. Maîtres d’école et catéchistes témoignent à l’envi du vif désir que marquent leurs élèves de se perfectionner. Tous ceux qui ont vécu en Corée, en dépit de la débâcle générale d’aujourd’hui, déclarent qu’un favorable avenir dépend seulement d’une réorganisation sérieuse de l’État, et d’une forte éducation morale de la jeunesse. La situation géographique de la péninsule, l’équilibre de son climat, la fertilité de son sol, la richesse de ses mines assurent un large bien-être national. Les vertus latentes du peuple une fois appelées au jour, le développement ne sera plus purement matériel, s’exprimera également sous les formes intellectuelles et spirituelles.

Espérons donc que le présent règne, si tragiquement ouvert, marquera la rénovation de la Corée ; espérons que la paix et la prospérité de la péninsule une fois établies, Chosen deviendra vraiment le pays du calme matinal…


Vay de Vaya.