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connue, mais le pays même n’en a jusqu’ici guère profité. Les mines de cuivre, de fer, d’argent, d’or, ont été négligées. À peine, sur les rivières, quelques lavages d’or sont-ils à signaler. Vers la fin du siècle passé seulement des compagnies étrangères obtinrent les concessions nécessaires pour entreprendre des travaux plus importans. Elles sont de nationalités diverses : anglaises, allemandes, belges, américaines. Tout étranger résidant ou même traversant le pays est devenu possesseur d’une concession minière. La vente de ces concessions, d’une valeur souvent fort douteuse, est devenue une des plus riches sources de revenus de la maison impériale ; malgré les difficultés sans nombre rencontrées, l’exportation de l’or, dans la dernière année du siècle, s’est élevée à 5 millions de dollars et, depuis lors, augmente annuellement. La compagnie américaine, entre toutes les autres, a réalisé de très gros bénéfices. Mais peu à peu, à la suite de l’occupation et des voies ferrées, les mines passent aux mains des Japonais. D’ici quelques semaines, une fois opérés au Sud de Moukden, les raccordemens encore nécessaires, de Kirin à Fusan, à travers les régions les plus fertiles de la Mandchourie et de la Corée, courra une ligne entièrement nippone.

Les services de navigation sont semblablement monopolisés par deux compagnies japonaises : la Osaka-Shasen-Kaisha et surtout le Nippon-Yusen-Kaisha ; leurs flottes, très considérables, couvrent tous les océans, relient entre eux les ports de l’Asie, de l’Autralasie, de l’Amérique et de l’Europe. C’est la Nippon Yusen-Kaishi qui, puissamment subventionnée, a établi entre Shimonosaki et Fusan ce service quotidien, grâce auquel quelques heures séparent seulement le Japon de la terre continentale. Avant que l’année se termine, la Corée, dont le surnom de « pays ermite » signalait l’isolement, égal à celui du Thibet, sera en communications directes avec les grands centres de l’univers.

Décidément, Fusan m’est devenu étranger. À peine si j’y puis diriger mes pas ! Pourtant, je retrouve dans le fond de la baie les ruines pittoresques de la forteresse de Korrian : en face, voici la petite colline boisée dont le faîte, en pain de sucre, est chargé d’une pagode aux formes fantastiques. J’avance maintenant sur la route de Tong-San et les vieilles chaumières, autrefois vues, semblent réapparaître. Dans les champs, les paysans sont au travail, attifés de leur costume de toile blanche. Les taureaux, dont un anneau de fer perce le naseau afin de