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des hospices, prisons, etc. Parmi ces 311 437 colons civils d’origine européenne, on comptait 156 365 Français d’origine, soit très légèrement plus de la moitié, 92 510 Espagnols, 25 759 Italiens et 36 303 autres étrangers de nationalité diverse. Ces résultats, sans être défavorables, n’étaient pas, cependant, des plus brillans. On voit que, dans la longue période de 1831 à 1876, qui a correspondu à un excédent annuel très considérable, variant généralement entre 100 000 et 230 000, des naissances sur les décès en France, le peuplement non seulement français, mais européen, de l’Algérie fut relativement modeste. La cause en était, non seulement le peu de goût du Français pour l’expatriation, mais les obstacles qu’offre à celle-ci toute colonie mixte, peuplée en grande partie d’indigènes, et n’ayant pas un marché de terres quasi indéfini, comme celui des colonies ou des terres de peuplement : Canada, Australie, République Argentine, etc.

De 1876 à 1906, la situation au point de vue démographique était plus défavorable, en ce sens que, en France, l’excédent des naissances sur les décès se réduisait de plus en plus, au point de quasi disparaître à partir de 1890, sauf deux années exceptionnellement favorisées, plutôt par la réduction de la mortalité que par l’expansion de la natalité, les années 1896 et 1897. Certaines circonstances économiques, en revanche, aidèrent puissamment dans cette période au peuplement français et européen de l’Algérie : la principale fut l’apparition du phylloxéra et la destruction des vignobles dans tous les pays méditerranéens, France, Espagne, Italie. L’Algérie, dont on reconnut alors l’aptitude remarquable à la culture de la vigne, attira les vignerons sans ouvrage du nord de la Méditerranée. Le peuplement français et européen s’accéléra : le recensement de 1906, dont on a publié il y a quelques mois les chiffres exacts, constate que la population civile d’origine européenne de l’Algérie, en laissant de côté les Israélites indigènes naturalisés, a presque doublé depuis 1876 ; elle atteint 615 618 âmes pour la population dite municipale et doit approcher de 625 000 âmes, si l’on y joint la part de l’élément européen dans la population comptée à part, hôpitaux, prisons, collèges, etc. (on ne donne pas le chiffre de cet élément pour cette partie de la population).

Ainsi en soixante-seize ans, l’Algérie s’est enrichie d’environ 625 000 habitans civils d’origine européenne ; c’est un résultat très appréciable et qu’il ne faut aucunement rapetisser. Il n’est