Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 42.djvu/876

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lois de 1905 et 1907. Dans quelques jours, le 1er janvier 1908, le régime nouveau entrera en vigueur. C’est alors que commenceront les difficultés et que s’accumuleront les ruines. La publication du décret du 27 septembre n’a causé aucun trouble, et tout porte à penser que les inventaires s’accompliront sans provoquer autre chose que de platoniques protestations ; les mesures palliatives que le gouvernement général ne manquera pas de prendre adouciront les transitions ; mais, à mesure que le temps s’écoulera, ces difficultés, loin de disparaître, iront en grandissant jusqu’à ce qu’apparaissent si clairement les conséquences désastreuses d’un régime où l’Eglise et l’Etat ne se connaissent que pour se combattre, que l’on sentira, de part et d’autre, le besoin de trouver un terrain d’accord et un mode d’entente.


II

Le décret du 27 septembre s’applique à tous les cultes qui étaient, en Algérie, reconnus et salariés par l’Etat français : il atteint donc le culte musulman et intéresse les indigènes comme les Européens. Il aurait été, en vérité, trop contraire à toute justice et à toute égalité que l’Etat continuât à reconnaître et à salarier un culte musulman au moment où il rompait tout lien avec le clergé catholique. Mais c’est là surtout une satisfaction de forme donnée à l’opinion publique. En réalité, l’organisation religieuse musulmane est tellement différente de l’organisation catholique, ses rapports avec l’Etat français sont si peu comparables à ceux du clergé catholique, que les mêmes mots, quand ils s’appliquent à l’un ou à l’autre, ne sauraient avoir le même sens, ni les mêmes lois le même effet.

L’Islamisme n’a pas de sacremens, donc, à vrai dire, pas de clergé ; il tient tout entier dans le Coran et dans ses commentateurs, dont chacun lit, comprend et applique les préceptes selon ses moyens et d’après son jugement. Abandonnés à eux-mêmes, sans communication avec les centres religieux de l’Islam, les musulmans peuvent garder indéfiniment, sans altération grave, la foi et la pratique de leur culte, tandis qu’une chrétienté catholique, privée de piètres et de sacremens, dépérirait comme une plante privée d’eau. L’imam est celui qui, pendant la prière, se plaçant devant les fidèles, donne le signal