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successivement votées, la France eût elle-même fixé, d’une façon plus définitive, le nouveau régime issu de la séparation des Eglises et de l’Etat, avant d’en faire promulgation et application en Algérie. Mais l’Algérie n’a pas seulement des colons laborieux, des hommes d’action et d’initiative qui travaillent à augmenter sa richesse et sa prospérité, elle a aussi la minorité parasite et bavarde qui vit pour la politique et de la politique, et qui réussit souvent, par ses loges et ses comités, à faire la leçon aux fonctionnaires et la loi au gouvernement. Dans ce milieu, on se montre particulièrement impatient d’assurer à la colonie les « bienfaits » de la séparation. Plus clairvoyans, les représentans de l’Afrique, parmi lesquels on compte des hommes d’Etat de haute valeur et de longue expérience, appréhendaient les embarras que ne manquerait pas de soulever l’application de la loi ; hormis un seul, il ne semble pas qu’ils aient poussé le gouvernement à hâter le moment de la promulgation de la loi. Quant au gouverneur général, mieux placé que personne pour juger, avec son esprit pratique, des difficultés et des périls de l’application, dans cette colonie jeune et vigoureuse, d’une loi métropolitaine où retentissent, comme dans un raccourci d’histoire, les passions politiques et religieuses de vingt générations mortes, personne n’ignore eh Algérie qu’il s’est efforcé de concilier, autant que possible, les intérêts dont il a la charge avec la nécessité de tenir compte de la volonté du Parlement. Il a cherché à introduire dans l’application de la loi tous les tempéramens et tous les délais nécessaires pour en pallier les inconvéniens. Qu’il y ait réussi, comme nous le verrons, dans une mesure insuffisante, mais cependant sensible, il convient de l’en féliciter comme d’une victoire partielle de la méthode d’autonomie coloniale.

Un règlement d’administration publique, daté du 27 septembre et publié par le Journal Officiel du 30, promulgue en Algérie les lois du 9 décembre 1907, du 2 janvier 1907 et du 28 mars 1907, et détermine les conditions dans lesquelles la séparation des Eglises et de l’Etat y sera assurée. Le décret reproduit textuelle nient les principes fondamentaux de la loi du 9 décembre et rend applicables à l’Algérie toutes les dispositions des lois de 1905 et de 1907. Sur trois points principaux seulement, il se distingue de la législation métropolitaine. Le premier concerne les « associations cultuelles. » Au lieu d’un nombre de personnes variant de sept à vingt, selon la population