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industries minière et métallurgique l’essor le plus vaste. Les banques ont prêté un concours empressé à ces diverses entreprises et mis à leur service, directement ou indirectement, non seulement le capital actions et les réserves, mais une partie des dépôts. Ces besoins persistans de numéraire se traduisent par une situation extraordinairement tendue de la Banque impériale allemande, ses bilans décadaires accusent depuis longtemps des chiffres très élevés pour la circulation des billets et le portefeuille d’escompte, en face desquels rencaisse diminue au lieu de grossir comme elle le devrait. Hâtons-nous d’ajouter qu’il ne s’est rien produit de l’autre côté du Rhin qui ressemble aux exagérations américaines : presque toutes les entreprises y reposent sur une base sérieuse ; mais plusieurs manquent de capital et l’épargne n’a pas grossi assez vite pour leur fournir immédiatement tout celui dont elles ont besoin.

Nous constatons ainsi une différence notable de situation entre l’Amérique et l’Europe, et nous sommes amenés à dégager la première des causes de la crise qui lui sont spéciales, l’abus de l’inflation qui a sévi chez elle avec fureur : par inflation, nous entendons la création d’entreprises nombreuses dont le capital nominal ne correspondait pas à la valeur réelle, soit qu’il s’agît d’une nouvelle industrie dont on émettait les actions en nombre excessif, soit que, par une de ces combinaisons chères aux Yankees, un certain nombre d’usines, de fabriques, de maisons de commerce, d’entreprises de transport fussent réunies en une, seule compagnie, et que le capital de cette dernière fût fixé à un chiffre dépassant de beaucoup l’addition des capitaux de chacune des sociétés que l’on réunissait. Il était inévitable qu’à un moment donné, ces échafaudages fragiles s’écroulassent : c’est ce qui n’a pas manqué de se produire. La chute a été encore plus violente et dangereuse quand l’exagération des espérances s’est doublée, il faut avoir le courage de le dire, d’une véritable malhonnêteté : nombreux sont les cas où des hommes sans scrupule, — et il est douloureux d’avoir à constater que parmi eux il s’en est rencontré à qui leur situation aurait dû épargner de pareilles fautes, — ont profité de l’engouement du public pour majorer d’une façon scandaleuse les capitaux des entreprises qu’ils patronnaient plus ou moins ouvertement. Il y a eu de ce chef, sur les marchés américains, de véritables écroulemens, tout à fait différens, dans leurs origines et leur allure, de la baisse en