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chacun de laisser son argent dans les banques, autorisa le secrétaire d’Etat M. Cortelyou à émettre des bons du Trésor pour 775 millions de francs. Ces émissions, composées pour deux tiers de bons, à un an d’échéance, rapportant 3 pour 100 d’intérêt, et, pour un tiers, d’obligations 2 pour cent dont le produit est destiné à couvrir les frais de construction du canal de Panama, ont fait rentrer dans les caisses du Trésor une somme correspondante de billets et d’espèces, dont les particuliers et les banques n’hésitent pas à se démunir à son profit, puisqu’ils n’ont pas cessé d’avoir pleine confiance dans sa solvabilité. A son tour, il reverse ces montans à son crédit dans les banques, dont il augmente ainsi la puissance et le crédit. Mais celles-ci ont encore recours à une autre ressource, qui a déjà été employée avec succès lors de crises précédentes et qui est en quelque sorte acclimatée aux Etats-Unis : c’est l’émission de certificats des chambres de compensation.

On sait que dans chaque ville importante, les banques sont agrégées à un établissement qui porte le nom de clearing-house et qui a pour objet de faciliter les règlemens de comptes entre les banques affiliées. Celles-ci lui remettent chaque jour les titres de créance qu’elles ont sur leurs confrères, et seul, le solde résultant des débits et des crédits de chacune d’elles se règle en espèces. En temps de rareté de celles-ci, les banques conviennent de liquider leurs comptes respectifs au moyen d’une monnaie spéciale qui n’a cours qu’entre elles et qui consiste en certificats de la Chambre de compensation (clearing house certificates). Ces certificats sont délivrés par la Chambre à toute banque qui lui en fait la demande et lui remet en garantie des obligations de premier ordre, préalablement admises par le Comité : ils permettent donc de mobiliser, de monnayer en quelque sorte des titres difficiles à vendre sans perte au moment de la panique : comme ils coûtent à ceux qui les demandent un intérêt élevé, ils sont retirés dès que les circonstances redeviennent normales, et il n’y a pas de danger de les voir rester indéfiniment en circulation. Dans certaines villes, on a été plus loin, et les banques ont émis des chèques au porteur de faible dénomination, par exemple de 1 à 20 dollars, destinés à circuler de main en main et à faciliter les petits échanges. C’est une sorte de monnaie obsidionale, comme nous en avons connu pendant le siège de Paris en 1870.