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eu une par les changemens d’étiquette et par des changemens de destination. Ces changemens, je ne les regrette pas, étant de ceux qui les ont longtemps réclamés. Si l’Assistance à laquelle on confie les petits dévoyés est une véritable « assistance, » prenant tous les moyens nécessaires pour les intéresser à la vie, pour leur persuader que l’existence honnête et régulière a ses joies, pour les former à l’affection par la reconnaissance, pour leur rendre l’habitude des émotions saines et leur faire perdre l’habitude des autres, alors ce sera très bien, et on en retrouvera plus tard le bénéfice. La diminution du crime ne s’effectue pas toute seule par les forces de la nature individuelle abandonnée à elle-même ou sous des influences mystérieuses. Elle suppose qu’on s’est donné la peine d’y travailler et que ceux qui étaient restés debout ont soutenu ceux qui chancelaient. Mais s’il n’y a qu’un changement de dénomination appelant, par exemple, écoles de bienfaisance ou maisons de préservation ce qu’on appelait maisons de réforme ou de correction, — ces derniers mots avaient eu, eux aussi, dans l’origine, la prétention d’afficher une indulgence de bon augure ; — si grâce à cette rénovation peu compliquée on s’octroie la permission dangereuse de donner plus de liberté à ceux qui avaient abusé déjà de celle qu’ils avaient ; si, pour étendre le prétendu bienfait de cette méthode, on entasse dans les mêmes murs des bataillons d’adolescens ayant grandi un peu plus dans la corruption et ayant acquis un peu plus complètement l’expérience du mal, alors qu’aura-t-on fait ? On aura usé, on aura discrédité bientôt un mot de plus, et les pauvres sujets qu’on aura fait sortir pour quelques années de la statistique criminelle y rentreront sûrement après une série d’années qu’il y a lieu de prévoir assez courte.

Si, dans des vues systématiques ou pour sauver la face de la justice, on abuse des non-lieu, des simples avertissemens et des sursis, on condamne ceux qui ne méritaient pas cette bienveillance à reparaître bientôt dans des conditions pires encore.

Si enfin on confond avec les vagabonds intéressans une trop grande quantité de ceux qui ne le sont pas, on encourage ces derniers à continuer leur existence de chemineaux ; en même temps, on se prive des moyens de retrouver tous les délits, tous les crimes peut-être qu’ils ont commis au cours de leurs pérégrinations et sous le couvert d’un voyage en zigzag à la recherche d’un travail… qu’ils prient Dieu de leur épargner. Bref, en tout