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absorbante et difficile de méditer chacune de ses paroles, chacun de ses écrits et de ses actes, de prévoir enfin chacun de ses desseins. Examinant en 1865 les débuts de « la nouvelle ère à Berlin, » il constatera qu’au fond de l’effervescence qui travaille la Prusse et l’Allemagne, gît toujours la question de l’unité allemande. « Depuis 1850 jusqu’à la guerre d’Italie, dit-il, tout l’intérêt de la vie nationale s’est concentré dans la Prusse. Tandis que l’Autriche n’a été occupée pendant toute cette période que d’un triste et assez terne travail de nivellement bureaucratique, et que les autres États secondaires de l’Allemagne n’ont fait que copier, plus ou moins heureusement, le modèle d’un despotisme éclairé que leur donnait l’étranger, seule la Prusse présentait le tableau d’une lutte animée et parfois dramatique contre les principes anciens et modernes. » Klaczko étudiait avec soin les tendances et les efforts des Mommsen, des Freytag, des Rosenkranz, des Strauss, des Sybel, des Forster, des Dahlmann, des Gneist, des Gervinus vers limité allemande, et leur prodigieuse activité qui faisait un si grand contraste avec l’inertie et la frivolité des écrivains étrangers. Il citait entre autres les déclarations de Gervinus, son ancien professeur qui, dans son Introduction à l’Histoire du XIXe siècle, affirmait que l’œuvre du monde appartenait à la race germanique et que les nations latines étaient vouées à la dégradation et au dépérissement. Mommsen, comme on le sait, en dira davantage, et cela dans les termes les plus amers… Klaczko déplorait non seulement la légèreté des écrivains, mais l’imprévoyance des hommes d’Etat autrichiens qui persistaient à faire de leur pays au sein de l’Europe une sorte d’Empire du Milieu ; il regrettait aussi l’impossibilité pour l’Autriche d’unir ses destinées à celles d’une Allemagne régénérée, tandis que la Prusse, sa rivale, grandissait menaçante.

Le 1er mai 1866, il montrait l’Autriche expiant déjà ses déplorables faiblesses des années 1862 et 1864. Quant aux États secondaires de la Germanie qui avaient tant poussé à ce qu’ils appelaient la délivrance des duchés, ils voyaient maintenant tourner contre eux ces fameux canonniers de Missunde qu’on avait désignés à l’admiration des siècles futurs. « Toutefois, à la satisfaction qu’un tel retour de la justice historique, dit-il, fait éprouver à toute âme bien née, viennent malheureusement s’ajouter, en l’effaçant presque, des considérations bien moins idéales et de véritables angoisses. Il s’agite, à l’heure qu’il est, de l’autre côté