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d’une attitude si émouvante, lui demanda ce qu’il voulait… il répondit : La Patrie ! Lame du chantre de Resurrecturis dut tressaillir. L’idéal qu’il avait rêvé devenait une réalité, et sa poésie, restée si longtemps anonyme, tout un peuple la signait de son nom. »

En donnant à la Revue, en 1862, la traduction fidèle des Souvenirs de Pietrowski, ce Polonais qui, par une sorte de miracle, avait pu s’évader de la Sibérie où ses opinions politiques l’avaient fait déporter en 1844, Klaczko rappelait les souffrances de ses compatriotes sous la domination russe. « S’il y a en Pologne, disait-il, un mot qui dépasse ; peut-être tout ce que l’éloquence humaine a su trouver pour donner un accent au désespoir, c’est le mot : « A ne plus jamais vous revoir ! » qu’adresse à sa famille et à ses amis tout condamné politique au moment de s’acheminer vers la Sibérie, tant la conviction est grande que la Sibérie ne lâche jamais sa proie ! Depuis bientôt un siècle, elle enlève à la Pologne ses enfans les plus généreux, ses femmes les plus dévouées. Et cependant, on en revient parfois ! » Comment ? Par une amnistie qu’accorde exceptionnellement le tsar, ou par un prodige pareil à celui qui fit évader Beniowski, Mme Felinska ou Piotrowski. Le livre intitulé : Les Souvenirs d’un Sibérien, publié à Posen en 1861, fut donc traduit par Klaczko et émut profondément les lecteurs par le récit des souffrances des déportés et par les aventures extraordinaires qui signalèrent l’évasion de Piotrowski. Peu d’ouvrages sont aussi touchans, plus dramatiques que celui-là ! Je ne lui connais d’égal que les Souvenirs de la Maison des Morts de Dostoïewski.

Enfin, parmi les travaux que Klaczko a publiés en France sur son pays, je dois signaler encore la belle étude parue en 1869 sur le Royaume de Jajello et son dernier historien, Karol Szajnocha, érudit de premier ordre qui a su retracer les siècles de splendeur de la Pologne, avec une sorte de génie et rendre à l’histoire nationale une couleur, une vie, une lumière sans pareilles. Klaczko terminait son étude en ces termes : « Aujourd’hui encore, comme pendant les siècles passés, la Pologne lutte par ses convulsions et par son agonie, et ne fût-ce que par l’exemple effrayant de ses tortures. » La persécution que subit actuellement la Posnanie n’est pas de nature à faire trouver ces expressions excessives. « Les conseils, ajoutait Klaczko, ne manquent