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impérieuses ? Nous prévoyons que la résistance de M. Caillaux ne sera pas plus inflexible cette fois que les précédentes. S’il la maintient encore, on sent bien qu’il y brûle ses dernières cartouches, et elles ne sont plus chargées qu’à poudre. Après avoir parlé de l’opinion de beaucoup de ses directeurs : « Il était de mon devoir, dit-il, de faire connaître à la Commission cet état d’esprit ; mais je dois ajouter qu’après avoir mûrement réfléchi, après avoir fait une fois de plus le tour de la question, je ne saurais proposer à la Commission d’entrer dans la voie où elle pourrait être tentée de s’engager. » Soit ; mais il faudrait en montrer une autre à la Commission, et M. Caillaux n’en fait rien. Il fait même le contraire et se livre à une charge à fond contre l’impôt des patentes, qu’il déclare être le plus injuste et le plus inégal de tous. Il relève en effet dans cet impôt un certain nombre d’inégalités qu’il étale avec complaisance, après quoi, il laisse sa conclusion dans le vague. Ses préférences, on le sait, sont pour la déclaration facultative, mais qu’il sera toujours facile de rendre perfidement, sournoisement obligatoire, en taxant d’office le contribuable au-delà de ses revenus véritables qu’il sera dès lors forcé d’avouer. Toute cette partie de la lettre de M. Caillaux témoigne d’un embarras dont nous ne sommes pas surpris, car c’est par là que son impôt périra.

Mais nous n’avons nullement l’intention d’étudier aujourd’hui dans ses détails son projet de loi, ni même sa lettre à la Commission de législation fiscale. Nous nous contenterons de dire que nulle part, dans des expériences qui n’ont été qu’esquissées, on n’a pris un contribuable déterminé et on ne s’est demandé quel était l’ensemble de son revenu : c’est pourtant ce qu’il aurait fallu faire pour savoir comment il serait atteint par l’impôt. On a essayé de se rendre compte de la manière dont fonctionnerait l’impôt sur les revenus de la terre, et on n’y est parvenu que très imparfaitement puisqu’on a conclu que la déclaration de contenance dont nous avons parlé plus haut « était un élément d’information et de contrôle souvent indispensable. » On a essayé de se rendre compte de la manière dont fonctionnerait l’impôt sur les revenus industriels et commerciaux, et ici les déceptions ont été si grandes qu’on a conclu à la nécessité de la déclaration sous une forme directe ou indirecte. Mais on s’en est tenu là. Quant aux revenus des professions libérales, il n’en a même pas été question. Plus on relit la lettre ministérielle, plus on est frappé de ses lacunes et de ses insuffisances. M. Caillaux convie la Commission et il conviera demain la Chambre à le suivre :