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néanmoins que le bon sens populaire ne fasse promptement justice de toutes les faussetés qu’on a répandues.

Votre Majesté, je l’espère, ne doutera jamais de mon désir de marcher d’accord avec son Gouvernement et du regret que j’éprouve quand momentairement (sic) cet accord n’existe pas.

En la priant de présenter mes hommages à S. A. R. la duchesse de Kent et mes tendres amitiés au Prince, je lui renouvelle l’assurance de la sincère amitié et de l’entier dévouement avec lesquels je suis, de Votre Majesté, le bon frère et ami.


Le comte de Clarendon au prince Albert.


20 mai 1857.

Monseigneur,

J’ai l’honneur d’informer Votre Altesse Royale que j’ai eu aujourd’hui une très longue et très intéressante conversation avec M. de Persigny. Il m’a parlé des différentes utopies de l’Empereur, de la conviction de Sa Majesté que l’Angleterre, la France et la Russie devraient entre elles régler les affaires de l’Europe, du peu de cas, qu’il fait de l’Autriche ou de toute autre puissance, et des différens petits griefs que Sa Majesté pense avoir contre le Gouvernement de la Reine, et dont l’importance a été exagérée par la malveillance ou la stupidité des personnes, qu’écoute plus ou moins l’Empereur.

M. de Persigny m’a dit aussi que, dans une conversation, à laquelle il avait eu soin de faire assister le comte Walewski, il avait solennellement prévenu l’Empereur qu’il courrait le plus grand danger à dévier tant soit peu de la voie de son véritable intérêt : l’alliance anglaise. Tous les souverains qui le flattent et le cajolent dans un intérêt personnel, le considèrent comme un aventurier, et ne croient pas plus à la stabilité de son trône ni à la durée de sa dynastie, qu’à des événemens d’une extrême improbabilité. Les Anglais, au contraire, qui jamais ne condescendent à flatter ni à cajoler qui que ce soit, mais qui cherchent l’intérêt de l’Angleterre, sont attachés à l’alliance française et à l’empereur des Français, parce qu’ils attachent une grande importance à des relations pacifiques avec la France. Ce pays est en effet le seul en Europe qui puisse porter atteinte à l’Angleterre, et, d’autre part, l’Angleterre est le seul pays qui soit à