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France n’avait le choix qu’entre deux politiques : donner ou refuser son adhésion. Si elle avait choisi la dernière, elle eût pris librement une décision, et cette scission n’aurait rien eu d’offensant aux yeux de la nation.

Mais il y a une importante différence entre quitter une compagnie pour des motifs personnels ou en être repoussé à coups de pied. Je vous demande de parler sérieusement à lord Melbourne, qui est la tête de votre gouvernement, sur ces importantes affaires. Elles pourraient tout bouleverser en Europe, si la faute commise n’est pas réparée et atténuée.

Toujours, ma très chère Victoria, votre oncle dévoué.


Le roi des Belges à la reine Victoria.


Wiesbaden, 22 septembre 1840.

Ma très chère Victoria,

… Je n’ai pas le temps aujourd’hui de vous écrire longuement sur la politique du jour, mais je suis loin de penser que les Français ont agi avec sagesse dans les affaires d’Orient. Je dois dire que je crois que le Roi avait de bonnes intentions. Néanmoins, je ne me serais pas abstenu d’aller à la Conférence, comme il le fit, quoiqu’on France l’intervention contre Méhémet-Ali ne fût certainement pas populaire. Le fond de la politique anglaise est logique, mais la forme envers la France fut et est encore dure et insultante. Je ne trouve pas que la France, qui ces dix dernières années se conduisit bien, et le pauvre Roi, qui faillit être tué je ne sais plus combien de fois, méritent d’être traités avec tant de malveillance, et tout cela apparemment pour plaire au grand autocrate. Nous ne devons pas oublier quels furent les fruits de la première convention de juillet 1828, du 16 ou 26, je crois. Je dois m’en souvenir, car je l’invoquai assez souvent en vain lors de l’affaire de Grèce.

La première convention amena la bataille de Navarin et la seconde campagne des Russes, qui se termina en fait par la mort de la vieille Porte, par le traité d’Andrinople[1]. Votre Majesté

  1. En vertu de ce traité (14 septembre 1829), les principautés du Danube furent virtuellement déclarées États indépendans, les droits concédés à la Russie pour la navigation dans le Bosphore et lus Dardanelles étaient confirmés, les affaires grecques réglées par l’insertion dans le traité des termes du protocole du 22 mars 1829.