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pénétrer dans le cercle intime de notre famille, est de nature à produire sur son esprit une impression durable. Il verra qu’il peut compter sur notre amitié et notre honnêteté envers lui et son pays, aussi longtemps qu’il nous demeurera fidèle. D’un caractère naturellement franc, il se rendra compte des avantages qu’il y a pour lui à rester loyal. S’il réfléchit à la chute de la précédente dynastie, il verra que la principale cause fut la violation d’engagemens pris… et, à moins que je ne me trompe beaucoup sur son caractère, il évitera certainement une pareille faute. Il ne faut pas oublier non plus que ses sentimens aimables envers nous, et par conséquent envers l’Angleterre dont les intérêts sont inséparables des nôtres, doivent s’affirmer davantage quand on se rappelle que nous sommes presque les seules personnes de son rang, avec lesquelles il ait pu vivre sur le pied de l’intimité, donc les seules avec lesquelles il puisse parler librement et sans réserve, ce que naturellement il ne saurait faire avec ses inférieurs. Lui et l’Impératrice doivent se sentir extrêmement isolés, ne peuvent avoir confiance dans les seuls parens qu’ils aient près d’eux en France, entourés de courtisans et de serviteurs qui, par crainte ou intérêt, leur dissimulent toujours la vérité. En conséquence, il est naturel de croire qu’il ne se séparera pas volontiers de ceux qui, comme nous, ne se font pas scrupule de lui faire connaître les faits réels, et sont, dans leur conduite, toujours guidés par la justice et l’honnêteté, d’autant plus qu’on considère qu’il a toujours été un amoureux de la vérité. J’irai même encore plus loin et je crois qu’il est en notre pouvoir de le maintenir dans le droit chemin, de le protéger contre l’extrême légèreté, l’amour du changement et, jusqu’à un certain point, le manque d’honnêteté de ses propres serviteurs et de son pays. Nous ne perdrons jamais l’occasion de réprimer dès le début toute tentative de la part de ses agens ou de ses ministres pour nous duper. Nous le mettrons au courant des faits en toute franchise et lui demanderons d’agir de même vis-à-vis de nous s’il croit avoir à se plaindre. C’est ce que nous avons fait jusqu’ici, et comme lui seul réincarne la France, il devient extrêmement important d’encourager, par tous les moyens en notre pouvoir, ces relations loyales, qui, je dois le dire, ont existé entre lui et lord Cowley pendant ces derniers dix-huit mois, et qui existent entre nous, depuis que nous nous connaissons personnellement.