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portant intérêt, on ajoutait, à chaque transmission du porteur à un autre, les intérêts courus. Assurément cette circulation n’était ni aussi simple, ni aussi rapide que celle du billet de banque proprement dit. Néanmoins, l’avantage qu’offraient les billets à court terme de porter intérêt les firent facilement accepter. En 1837-1838, l’émission totale de ce papier dépassa 60 millions de francs. Elle oscilla ensuite, jusqu’en 1843, entre 35 et 58 millions. Laffitte mourut en 1844 et fut remplacé à la tête de la Caisse par trois gérans. A partir de cette époque, les émissions s’élevèrent, en moyenne, chaque année, à une somme totale de 80 millions de francs. En 1847, la « Caisse générale du Commerce et de l’Industrie » cessa ses opérations sous l’influence de la crise politique et économique d’où sortit la Révolution de 1848. La fin d’une banque de cette sorte, provoquée par de tels événemens, n’a rien qui doive surprendre. L’émission des billets à ordre, effectuée dans des conditions si difficiles était chose délicate, et la diversité des affaires de la « Caisse » multipliait les risques accrus encore par la situation troublée qui marqua les dernières années du règne de Louis-Philippe. S’il eût vécu, Laffitte serait-il parvenu à maintenir sa maison, à lui faire traverser, sans dommage pour son crédit, des crises aussi longues et aussi graves ? On peut en douter. Comme nous le connaissons, il n’était pas homme à fuir les responsabilités. Il avait fondé sa Caisse pour venir en aide, par un crédit plus facile, au Commerce et à l’Industrie ; ce n’est donc pas au moment où ce crédit devenait le plus nécessaire qu’il eût déserté la lutte. Malgré cet insuccès relatif et les difficultés qu’il rencontra, la tentative de Laffitte fut féconde à beaucoup d’égards. On suivit son exemple. D’autres établissemens du même genre[1]se fondèrent et rendirent de véritables services. La « Caisse » de Laffitte garda toujours la prédominance sur ces établissemens. Elle fut une aide précieuse pour le petit commerce et la petite industrie de Paris. En 1837-1838, le nombre des effets qu’elle escompta fut de 220 000, représentant une somme de plus de 276 millions de francs. Ces chiffres progressèrent, peu à peu, dans les années suivantes ; en 1844, année où mourut Laffitte, le nombre des effets escomptés par la « Caisse » atteignit le chiffre de

  1. « Le Comptoir général du Commerce, » dit « Caisse Ganneron, » fut fondé en 1843, et la « Caisse centrale du Commerce et des Chemins de fer, » dite « Caisse Baudon, » en 1846. Toutes les deux cessèrent leurs affaires en 1847.