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lui deviennent nécessaires, et elle doit améliorer avant tout sa situation internationale.

C’est cette ligne de conduite sage et pratique qui, en ces derniers temps, a prévalu. L’Angleterre a compris que le meilleur moyen d’assurer la sécurité de la frontière Nord de l’Inde était d’entourer ce pays d’une ceinture d’États alliés ou amis, de pays à sphères d’influence ou à protectorats diplomatiques et que, pour lui faciliter le rôle d’arbitre dans les litiges européens, il fallait avant tout créer des liens d’amitié qui seraient d’un utile concours au cas où des complications internationales se produiraient.

En ce qui concerne la défense extérieure de l’Inde qui, seule, doit nous intéresser ici, il n’y a qu’à se rappeler les déclarations par lesquelles lord Curzon, le 30 mars 1904, définissait la politique du gouvernement anglo-indien, et à les rapprocher des stipulations du dernier traité anglo-russe, pour juger si les visées actuelles de la diplomatie britannique ont été suffisamment remplies. Le souci de confier les approches de l’Inde, conformément à ce qu’exposait lord Curzon, à des mains d’amis et d’alliés, ou de soustraire à toute influence étrangère les pays à proximité de l’Inde, est partout visible dans le traité du 30 août 1907. Que recherchaient surtout les Anglais au Thibet ? A interdire toute immixtion étrangère dans les affaires intérieures de ce pays, et c’est ce qu’ils avaient déjà forcé le gouvernement thibétain à accepter. Par l’accord anglo-russe, la Russie adhère également à cette politique. Sans doute, par le même accord, les Anglais s’interdisent une semblable immixtion ; ils se ferment la porte à eux-mêmes ; mais ils la ferment aussi aux autres, et le but est atteint. Désormais, la frontière septentrionale de l’Inde est couverte par l’Etat ermite, qui va retomber dans l’inertie de sa vie monacale.

La même évolution de la diplomatie anglaise a eu lieu pour l’Afghanistan. Elle ne cherchait pas à incorporer ce pays à l’Inde, ni à faire de l’émir un allié offensif contre la Russie, pas plus qu’à se servir du pays afghan comme d’une base d’opérations contre le Turkestan russe. Elle désirait seulement que l’émir et ses forces pussent coopérer à la défense de l’Inde. Telle est l’idée maîtresse du plan de lord Kitchener qui lie la défense de l’Inde à celle de l’Afghanistan. En déclarant, par le traité anglo-russe, qu’ils n’ont pas l’intention de modifier la