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base d’opérations d’une armée anglo-indienne qui remonterait le cours de l’Euphrate pour aller prendre à revers les forces que la France pourrait diriger à travers la Perse sur l’Inde. C’est toujours cette préoccupation qui, la même année, décidait le gouvernement anglais à installer un résident à Mascate, et, en 1803, un agent à Bassorah. En 1801, John Malcolm, envoyé d’Angleterre, réussissait de son côté à obtenir de la cour de Téhéran un traité d’alliance perpétuelle contre la France. Après la paix de Tilsitt, qui abandonnait la Perse aux entreprises de la Russie, sir Gore Ouseley profitait de la situation pour resserrer les liens d’alliance avec le schah Feth-Ali, en même temps que toute facilité était donnée au lieutenant Pottinger et aux capitaines Grant et Christie d’explorer la partie du pays confinant au golfe Persique.

Napoléon tomba ; mais le danger que les Anglais redoutaient, une attaque possible de la frontière Nord-Ouest, ne disparut point avec lui. Les Russes avaient pris dans leurs préoccupations la place des Français. Cantonnés au début du siècle en deçà de l’Oural et du Caucase et séparés des possessions anglo-indiennes par l’immense étendue des déserts du Turkestan, des steppes kirghises et du plateau de l’Iran, les Russes avaient entrepris de descendre vers le Sud, et se rapprochaient progressivement de la frontière de l’Inde. Ils avaient commencé par dépecer l’Empire persan, pris une partie du Daghestan en 1797, l’autre partie en 1813, ainsi que le Chirwan et la côte sur la mer Caspienne jusqu’à l’embouchure de l’Araxe, les khanats d’Erivan et de Nakitchewan en 1828, enfin l’Arménie persane jusqu’à l’Ararat. Les Anglais, effrayés de ces progrès des Russes, eurent l’habileté de leur faire accepter, en 1834, un accord par lequel les deux puissances s’engageaient à maintenir la Perse comme État indépendant. Du côté de l’Iran, le péril put être considéré comme momentanément conjuré, mais ce ne fut que pour renaître sur un autre point, plus menaçant et plus pressant.

Arrêtés du côté de l’Iran dans leur marche envahissante vers le Sud, les Russes, toujours tenaces dans leurs entreprises, reportèrent leurs efforts dans la direction du Turkestan. Après avoir soumis les hordes kirghises, ils apparaissent en 1830 sur les bords de l’Yaxarte. La nouvelle causa un grand émoi à Calcutta. Le gouvernement anglo-indien, pressé de prendre les