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difficile de faire beaucoup de bien. Tous les deux manquent d’argent, ce qui est pour eux une grande faiblesse. Nous pouvons sans doute aider Abd-el-Aziz à se procurer les premières ressources dont il a un besoin urgent ; nous ne le ferons, bien entendu, que s’il nous donne des garanties sérieuses de ses dispositions nouvelles, et si nous pouvons désormais avoir quelque confiance en lui. Quoi qu’il en soit, nous ne tirons plus de coups de canon et de fusil au Maroc ; nous causons avec le souverain légitime du pays ; nous négocions avec ses ministres. C’est un premier pas de fait dans un sens où nous finirons, peut-être, par aboutir à quelques résultats.

On a dit autrefois que la question d’Orient était essentiellement une question d’Occident : on peut dire de même que la question marocaine est une question européenne, et les incidens de ces dernières années l’ont bien prouvé. Lorsque nous songeons au Maroc, nous regardons du côté des puissances pour nous assurer qu’elles sont toujours d’accord et qu’aucune difficulté de leur part ne s’ajoutera à celles qui pullulent déjà sur place. Nous sommes heureux de dire que l’entente, pour le moment, paraît se maintenir, et que rien ne semble devoir la troubler. L’équilibre général s’est encore raffermi dans ces derniers temps par la conclusion du traité anglo-russe : encore un traité qui, tout en se rapportant aux affaires d’Asie, si graves pour les deux pays, n’en a pas moins, lui aussi, un intérêt européen. Si nous n’en parlons pas aujourd’hui avec plus de détails, c’est seulement parce que la Revue se propose de lui consacrer une étude d’ensemble dans une prochaine livraison. Ce traité, en faisant disparaître, au moins pour quelque temps, entre l’Angleterre et la Russie, les préoccupations qui les obligeaient à regarder toujours du côté de l’Orient, leur rend une plus grande liberté d’esprit en Occident où rien ne les divise aujourd’hui et où, au contraire, certains intérêts peuvent les rapprocher. Mais c’est là une observation que nous ne présentons qu’en passant, car elle n’a aucun rapport direct avec les affaires du Maroc.

Il en est de même des changemens qui viennent de se produire dans le personnel diplomatique à Berlin. La politique allemande, au sujet du Maroc, parait être aujourd’hui aussi nettement fixée que la nôtre : nous avons tous le même programme qui est l’exécution de l’Acte d’Algésiras, et la France n’a pas, en ce qui la concerne, la moindre velléité d’en sortir. Aussi sommes-nous convaincus que la politique allemande ne ressentira aucun contre-coup de la substitution, à la Wilhemstrasse, de M. de Schœn à M. de Tchirschky. M. de Schœn est un diplomate de carrière, qui a été autrefois secrétaire,