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sont susceptibles de donner. Ainsi la psychologie et le goût exotique, en nous permettant d’apprécier la valeur des races autochtones, doivent nous aider à réaliser le plus grand développement économique de leur contrée. Elles nous sollicitent déjà à percevoir que, contrairement aux avis répétés des colons, le Malgache est capable d’un labeur agricole suivi et fructueux, besognant même souvent à écarter la concurrence européenne, comme on l’a vu pour le riz et comme on le verra pour les petites cultures.


III. — LE PEUPLEMENT : GRANDE ET PETITE COLONISATION

Les Européens ne réaliseront rien de durable ni d’étendu sans la participation des Malgaches ; ceux-ci n’accompliront aucun progrès si de toutes parts l’exemple des Européens ne les en presse étroitement. De cette double constatation, on en vient, après y avoir été sans cesse sollicité au cours des voyages, à trancher le fameux problème : « Madagascar est-il une colonie de peuplement ou d’exploitation ? » par un avis différent de celui du gouvernement.

Ce pays n’a que deux millions et demi d’habitans pour une superficie égale à celle de la France et de la Belgique réunies, avec les climats les plus gradués et des contrées diversement aménagées pour les races les plus différentes. « Les solitudes malgaches sont bien arrosées, souvent très vertes, dit le géographe ; ce sont simplement des terres vierges qui attendent leur premier habitant. Madagascar est en voie de peuplement. » L’Ouest surtout, à peine habité à cause de la turbulence sakalave et traversé par des fleuves en grande partie navigables, réserve de vastes territoires fertiles à la colonisation. Mais ce peuplement peut-il être européen ? Le Gouvernement Général, soucieux de ne pas compliquer davantage les affaires intérieures de l’île au point d’écarter l’immigration boer, s’est prononcé pour la négative. Son avis pessimiste n’eut aucune peine à trouver des échos dans la métropole où les Bureaux et les économistes officiels, professeurs-fonctionnaires des écoles spéciales, ne sont pas favorables à la colonisation de peuplement. M. Marcel Dubois a excellemment résumé l’opinion générale en ces termes : « Eh quoi ! pensent tes esprits critiques qui considèrent la condition actuelle de Madagascar comme une condition naturelle, comment