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trop insister là-dessus, — le fait d’un copiste anonyme[1]. Si l’auteur, également anonyme, de la Table des matières, — elle est d’une autre écriture que tout le reste du recueil, — a été plus affirmatif, il est visible que la seule raison qu’il en ait eue a été de faire court, et il a abrégé le titre du Discours, comme il a abrégé les titres des autres pièces qui composent le recueil. Ne disons donc pas, comme on le dit couramment encore, que les bénédictins ou les jansénistes ont cru que le Discours était de Pascal. Un seul homme, que nous sachions, avant Victor Cousin, l’a cru, ou du moins nous a dit que d’autres le croyaient, — quels sont ces autres, il a négligé de nous le dire ; — et cet homme, il est possible, quoique peu probable, qu’il ait été bénédictin, ou qu’il ait été janséniste ; mais le fait est que nous n’en savons rien ; et tout ce que nous savons de lui, est qu’il s’est fait le copiste anonyme du Discours sur les passions de l’amour et d’une Lettre de Saint-Evremond.

Cette Lettre, — je laisse à dessein de côté les autres pièces du recueil, qui sont d’une autre écriture, et donc d’une autre provenance, — cette Lettre est bien de Saint-Evremond : elle figure dans les Œuvres imprimées du célèbre épicurien, et on la trouvera déjà, étrangement mutilée d’ailleurs, au tome II de l’édition in-quarto de 1692[2] : elle est adressée A Mme D. D. B. C. Elle est d’un caractère assez énigmatique. L’auteur parle-t-il sérieusement ? On pourrait le croire par endroits. Ou bien se moque-t-il plutôt ? Il se pourrait qu’il ne l’eût pas très nettement démêlé lui-même. La langue en est parfois assez ferme ; d’autres fois, la forme, qui veut être légère, est bien lourde et bien contournée. Le fond en est un peu maigre : c’est une suite de variations sur les diverses sortes d’Arsinoé. En voici le début :


À ce que j’apprends, Madame, vous voulez devenir dévote. J’en rends grâces à Dieu de tout mon cœur, ayant plus besoin en vos entretiens de la pureté des sentimens que vous allez avoir que de ceux qui pourraient vous être inspirés par le commerce des hommes. Je vous conjure comme intéressé avec le ciel de prendre une dévotion véritable, et pour rendre votre dévotion telle que je la veux, il sera bon de vous dépeindre celle de nos dames telle qu’elle est, afin que vous puissiez éviter les défauts qui l’accompagnent…

  1. Le mot l’attribue a été écrit en surcharge par-dessus un commencement de mot barré. Je ne note ce détail que pour être exact, et je ne songe à tirer de là aucune espèce de conséquence.
  2. Page 486.