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correction extérieure : elle n’en est pas moins profonde et sûre. Par la seule force de l’amour-propre, notre troupier est susceptible d’efforts surhumains et prolongés. De plus, sa vive intelligence le rend tout particulièrement apte à se plier aux méthodes de la guerre moderne, qui exige du simple fantassin une initiative personnelle croissante, que le rang serré ne lui permettait pas d’exercer ; le désir de se distinguer lui donne l’envie de pousser de l’avant quand même ; il est fier d’être remarqué de ses chefs et de ses camarades, et cette fierté lui fait oublier le danger et le conduit à des actes d’héroïsme à peine consciens. Dans les reconnaissances, dans la transmission des renseignemens, nos cavaliers montrent des qualités étonnantes : on est frappé de leur sentiment inné de l’orientation, de leur aptitude à se tirer d’affaire. Plus s’accroissent les difficultés des reconnaissances, plus ces aptitudes sont précieuses. Dans l’artillerie, le service des bouches à feu à tir rapide exige des canonniers des connaissances techniques assez étendues ; il est curieux de voir avec quelle facilité nos simples servans manient correctement les outils délicats mis entre leurs mains, avec quelle habileté nos pointeurs font les petits calculs que leur impose le manuel de tir. Nos sapeurs, presque tous ouvriers de profession, possèdent une intelligence, une habileté manuelle, une faculté de se débrouiller qu’on ne trouve nulle part au même degré. Et nos tringlots enfin sont étonnans en campagne : de simples brigadiers ont traversé tout le Mexique, comme chefs de convois à peine escortés, en pays hostile, sans laisser une voiture en route. Il y a dans la race française un ensemble de qualités merveilleuses, susceptibles de compenser largement quelques imperfections de notre organisme et quelque insuffisance de nos effectifs. L’importance de cette supériorité de race ira toujours en s’accentuant à mesure que les progrès industriels donneront à la guerre un caractère plus scientifique, exigeant plus d’initiative, d’intelligence, de finesse et de souplesse de corps et d’esprit. Aux qualités naturelles répondent les défauts correspondans : une certaine tendance à l’indiscipline, lorsque le chef, que les hommes sont très capables d’apprécier, n’inspire pas confiance. L’enthousiasme a parfois pour corollaire le découragement ; on nous l’a reproché souvent. Toutefois, en 1870, à Metz, nos troupes, soumises aux plus énergiques dissolvans, la défaite, la faim et l’oisiveté, ont bien montré leur ténacité. Le siège de