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n’était plus, dès lors, que la faculté d’opter entre deux noms, avait été, par là même, singulièrement restreint. Les chanoines de Cologne furent traités avec plus de désinvolture encore. La liste entière qu’ils proposaient fut repoussée : la Prusse évinçait trois de leurs candidats, comme personæ minus gratæ, et rayait les deux autres, comme étrangers par leur naissance à l’Etat prussien. Le conflit semblait sans issue. Rome l’aplanit en autorisant le chapitre de Cologne à proposer d’autres noms. Derechef les chanoines, en août 1865, dressèrent une liste de cinq noms, dont trois figuraient déjà sur la liste répudiée, dont deux étaient nouveaux. Le gouvernement répondit en septembre, en effaçant trois noms ; le droit électoral du chapitre ne pouvait s’exercer qu’en faveur de Melchers, l’évêque d’Osnabruck, ou du professeur Haneberg, de Munich ; et le commissaire royal chargé d’assister aux opérations électorales faisait d’ailleurs comprendre aux chanoines que, s’ils donnaient leurs suffrages à Pelldram, évêque de Trêves, ou bien au prince Gustave de Hohenlohe, le futur cardinal, Sa Majesté en serait ravie. Ce qui rendait la situation délicate, c’était la présence, dans le chapitre de Cologne, d’une minorité de chanoines systématiquement complaisans aux volontés de l’État. Ils perpétuaient dans cet auguste corps les traditions joséphistes contre lesquelles l’épiscopat de Droste-Vischering et les catholiques de 1848 avaient si vigoureusement réagi. Leur action paralysante empêchait l’Eglise, représentée par le chapitre, de maintenir en face de l’Etat l’intégrité de ses prérogatives.

Ketteler, du fond de son évêché de Mayence, suivait avec anxiété les étapes de la lutte. A deux reprises, la majorité du chapitre l’avait inscrit sur la liste, et Bismarck, à certaines heures, voyait cette candidature d’un œil assez propice. Mais les velléités de sympathie du futur chancelier s’arrêtaient et reculaient, lorsqu’il constatait qu’à la cour de Berlin, Ketteler était décidément en mauvaise posture, qu’on l’accusait d’être l’homme de l’Autriche, et qu’on lui faisait un grief d’avoir enlevé ses clercs à l’université de Giessen pour les mettre dans un grand séminaire, à proximité de sa houlette. Même avec l’appui discret de Bismarck, il était impossible que l’évêque de Mayence fût appelé au siège de Cologne. À cette heure décisive où le chapitre de Cologne était, si l’on peut ainsi dire, le titulaire des droits de l’Église, toute défaillance devenait un péril. Ce n’était