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Auguste Reichensperger dès le 26 décembre, le vœu le plus ardent de mon âme, et vous avez déjà atteint le but auquel j’ai travaillé pendant toute ma vie politique. »

La Chambre prussienne, telle que la composèrent les élections de 1852, posséda bientôt un parti de soixante-deux députés qui s’intitula, sans plus d’ambages, fraction catholique. La préoccupation de la liberté religieuse était entre eux un lien ; et chacun au contraire, dès que cette liberté n’était pas en jeu, pensait et votait à sa façon. Il y avait là des Rhénans, plutôt libéraux ; des Westphaliens, plutôt conservateurs ; des Trévires, plutôt démocrates : les nuances s’harmonisaient et se fondaient, et cette diversité même faisait espérer à Mallinckrodt que « la conception catholique la plus variée, la plus harmonique, la plus flexible, la seule vraie, pouvait devenir la charpente d’un état de choses nouveau, d’un état de choses durable. » Tout de suite, cette fraction panachée devint une puissance. A la fin de 1852, dans le scrutin pour la présidence de la Chambre, elle eut un rôle décisif, et la poussée d’espérances qu’elle suscitait dans les âmes inspirait à un curé des bords du Rhin, dès l’année 1853, tout un petit poème, qui s’intitulait : la Victoire de la Vérité, et dans lequel l’action des députés catholiques était comparée à la délivrance d’Israël. Montalembert à la même date écrivait avec allégresse : « La Prusse, pour l’instant, est, après la Belgique, le pays où les intérêts catholiques sont le mieux compris et garantis ; » et Bismarck s’attristait que les ultramontains fussent les arbitres de la Chambre.

Ils manœuvraient savamment entre les divers partis. Ils faisaient peu de bruit. « Nous ne nous posons pas en héros, écrivait Mallinckrodt en février 1853, à moins que fumer ne soit signe d’héroïsme. » Non moins que les gestes qui compromettent, ils abhorraient les partis pris qui enchaînent. « Nous sommes indépendans du Ministère, indépendans des droites, indépendans des gauches, » disait encore Mallinckrodt ; « mais quant à faire de l’opposition pour le plaisir d’en faire, cela, c’est exclu ! »

La Constitution prussienne de 1850 était leur opuscule de chevet ; elle était leur argument. On aurait aisément trouvé, dans la fraction, un certain nombre d’esprits auxquels la théorie même du régime constitutionnel était étrangère ou désagréable ; mais puisque, en fait, la constitution prussienne garantissait l’indépendance de leur Eglise, puisqu’elle les appelait à un rôle