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dauphins et croix… De chaque arcade partoient alternativement des rideaux fleursdelisés d’or en dessus, hermines en dessous… Au milieu de l’arcade paroissoit une médaille qui renfermoit une vertu qui s’appliquoit aux qualités de Mgr le Dauphin… Le Mausolée estoit grand et magnifique[1]… Des voûtes partoit un grand dais avec des rideaux ; le tout or et blanc excepté la calotte qui estoit noire et sur laquelle estoient des trophées d’armes… Au-dessus de la calotte estoit un carré surmonté d’une couronne environnée de girandoles, et, tout le long, régnoient des cierges qui faisoient l’effet des feuilles d’acanthe. Sur une estrade de cinq gradins estoit une forme de tombeau tout doré, soutenu de grilles de lion. Sur ce massif estoient les cercueils de Mgr le Dauphin et de Mme la Dauphine recouverts d’un drap d’or. » On ne trouva rien à reprendre à cette décoration sinon, « qu’elle étoit trop brillante pour une cérémonie aussi triste[2]. » Le duc de Berry, le duc d’Orléans et le comte de Charolais menèrent le deuil pour le Dauphin, la duchesse de Berry, la duchesse et Mlle de Bourbon pour la Dauphine. Le service commença à onze heures. Le Parlement, les Cours souveraines et un grand nombre d’évêques y assistaient. L’évêque de Metz officiait. L’oraison funèbre fut prononcée par l’évêque d’Aleth, Maboul. Cette oraison funèbre ne manque, le genre donné, ni d’éloquence ni de goût. Après avoir exalté la vertu et la piété du Dauphin, l’orateur passait à l’éloge de la Dauphine, mais il n’entreprenait point de les mettre sur le même pied, et il marquait, non sans finesse, les différences qui les séparaient. « Mettrai-je, ici, disait-il, la Dauphine dans un parfait parallèle avec le prince son époux ? Elle-même m’en désavoueroit ; et vous aussi, messieurs, souffririez avec peine que j’osasse honorer, par des louanges exagérées, la vertu d’une princesse qui, par tant d’endroits éclatans, en a mérité de véritables, » et il continuait en la louant d’avoir toujours fait remarquer en elle « une foi simple, une soumission sans réserve à tous les oracles de l’Église, une vénération profonde pour toutes les choses saintes, un goût de l’Écriture et des livres de piété qui lui en fit préférer la lecture à ces mensonges ingénieux où, sous prétexte d’amusemens, l’on boit à longs traits le venin subtil des plus dangereuses passions. »

  1. Ce mausolée est gravé en tête du Recueil des vertus de monseigneur le Dauphin, qui contient aussi plusieurs oraisons funèbres.
  2. Dangeau, t. XIV, p. 130.