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duchesse du Lude, et les dames du palais l’accompagnaient, ainsi que la grande-duchesse de Toscane, la duchesse de Vendôme, la princesse de Conti et Mlle de la Roche-sur-Yon. Ils jetèrent une dernière fois de l’eau bénite sur les deux cercueils, ainsi que l’évêque de Senlis et les évêques de Montauban, de Tournay et d’Autun qui l’assistaient. Les prêtres de la Mission, qui desservaient la paroisse de Versailles, entonnèrent le Miserere. Dix gardes du corps enlevèrent alors chacun des cercueils, et deux gardes chacune des caisses plus petites qui contenaient les entrailles. Pendant qu’ils descendaient le grand escalier et pendant qu’on chargeait cercueils et caisses sur un char funèbre, « auquel on faisoit trop d’honneur, dit Sourches, de donner ce nom, car ce n’étoit qu’un chariot informe. » La musique du Roi faisait entendre le De Profundis. Un même poêle recouvrit cercueils et caisses, et le cortège se mit en marche. « Alors, dit le Mercure, on commença de défiler dans cet ordre : premièrement, cent pauvres habillés d’une cape grise et claire, plissée, qui leur descendoit jusqu’aux pieds, avec un coqueluchon et une ceinture, ayant chacun un flambeau à la main, une compagnie des gardes du corps, cent vingt mousquetaires, soixante de chaque compagnie, suivis de celles des gendarmes et des chevau-légers, après lesquels suivoient les carrosses de deuil[1]. » Les cinq premiers contenaient les princesses et les dames ; le sixième était occupé par le duc d’Orléans, seul avec La Fare, son capitaine des gardes. Venait ensuite le carrosse des évêques où avaient pris place le Père de La Rue et le Père Martineau. Tous ces carrosses étaient attelés de huit chevaux. Précédant immédiatement le char, mais précédés eux-mêmes par les pages du Roi qui n’étaient point en deuil (car le Roi ne portait point le deuil de ses descendans), et qui tenaient tous un flambeau à la main, venaient les quatre hérauts d’armes ayant le roi d’armes à leur tête, et enfin le char funèbre. Ce char était également attelé de huit chevaux bardés de deuil jusqu’à terre, avec de grandes croix blanches d’argent. Quatre aumôniers à cheval, en rochet, manteau et bonnet carré, tenaient chacun un coin du poêle sur lequel étaient brodées, à droite les armoiries de France, à gauche, celles de Savoie. Une infinité de valets de pied portaient des flambeaux, cent gardes du corps, les gendarmes de quartier du

  1. Mercure de février 1712, p. 10.