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la Congrégation, qui étaient dans la chambre, entendissent ses paroles. Alors M. de Glandevès lui dit :

— Je vois que le Roi ne veut pas m’écouter, je me bornerai donc à lui demander ses ordres sur ce que je dois devenir.

— Retournez à vos Tuileries.

— Le Roi oublie qu’elles sont envahies, le drapeau tricolore y flotte.

— Il est pourtant impossible de vous loger ici.

— En ce cas, sire, je partirai pour Paris.

— Vous ferez très bien.

— Le Roi n’a pas d’autre ordre à me donner ?

— Non, pas moi, mais voyez mon fils ; bonjour, Glandevès. M. de Glandevès se rendit chez M. le Dauphin.

— Monseigneur, le Roi m’envoie savoir si Monseigneur a quelque ordre à me donner pour Paris où je retourne.

— Moi, non, quel ordre aurais-je à vous donner ? vous n’êtes pas de mon armée.

Et là-dessus, il lui tourna le dos. Voilà comment a été congédié, le trente, un des plus fidèles serviteurs de la monarchie. Il en était navré.

Il avait entendu M. de Polignac répondant à Mme de Gontant, qui l’accablait de reproches : « Ayez donc de la foi, ayez donc de la foi, elle vous manque à tous. » Et tenir aussi ce propos, qu’il a répété plusieurs fois : « Si mon épée ne s’était pas brisée entre mes mains, j’établissais la Charte sur une base inébranlable. » Cette phrase ne s’expliquait pas mieux que sa conduite, il avait au reste l’air parfaitement serein.

En revanche, le pauvre duc de Raguse était désespéré de tout ce qui s’était passé à Paris, accablé de tout ce qu’il voyait à Saint-Cloud, quoique sa scène avec M. le Dauphin n’eût pas encore eu lieu.

Pozzo vint chez moi. M. de Glandevès lui raconta les détails de sa visite à Saint-Cloud, et il en revint à son antienne du matin et de la veille : Ces gens-là étaient perdus, finis, Neuilly présentait la seule ressource qui pouvait sauver le pays. Je lui parlai de l’état de M. de Mortemart : « C’est un brave et excellent homme, me dit-il ; mais, fût-il en pleine santé, il n’est pas de force dans ces conjonctures. D’ailleurs, personne ne le serait avec ces gens-là. »

Pozzo me quitta de bonne heure. Plusieurs personnes passèrent dans mon salon, j’ai oublié qui elles étaient. M. Pasquier