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au cours des quatre premiers siècles, des réactions réciproques vinrent à se produire entre les élémens qui le composaient. L’adoption de la langue grecque par l’Église influa certainement sur les cantilènes hébraïques. Pour de nouveaux textes liturgiques, en grec, des mélodies, grecques aussi, furent créées. Enfin l’introduction du latin, remplaçant le grec à son tour, ne manqua pas d’amener encore des changemens nécessaires. Mais sous les dehors variables, la substance, ou le fond, demeura. Diatonique, purement vocal et monodique, obéissant au rythme plutôt qu’à la mesure, tels sont les signes où le chant grégorien se reconnut toujours et se reconnaît encore aujourd’hui.

« Chant grégorien, » disons-nous et depuis longtemps l’usage universel est en effet de le dire. Non pas, encore une fois, que saint Grégoire ait jamais passé pour le fondateur ou le créateur de ce chant. M. Gastoué nous assure que « le répertoire romain des mélodies ecclésiastiques est formé de pièces dont une importante, sinon la majeure partie, existait avant le VIIe siècle. »

Mais ce répertoire, antérieur au pontife bénédictin, qui devait lui survivre et continuer encore de se développer après lui, la mission ou l’une des missions du grand Pape, envoyé pour tant de grandes choses, fut de l’ordonner et de le codifier. L’« Antiphonaire » est le nom du code grégorien. On a disputé quelquefois au pontife la gloire de son œuvre. Il semble difficile, après l’ouvrage de M. Gastoué, de ne pas la lui reconnaître ou la lui restituer.

L’historien confirme d’abord l’autorité de Jean, le diacre romain, et le biographe en quelque sorte officiel de saint Grégoire, dont il a, dans un texte fameux, rapporté ce qui suit :

« Dans la maison du Seigneur, comme un autre savant Salomon, et à cause de la componction et de la douceur de la musique, le plus zélé des chantres COMPILA très utilement l’antiphonaire « centon ; » il constitua aussi la Schola cantorum, qui chante encore dans la Sainte Église romaine d’après les mêmes principes ; et, avec de nombreux champs, lui donna deux maisons qu’il fit construire, savoir : l’une sous les degrés de la basilique du bienheureux Pierre apôtre, l’autre sous les constructions du patriarcat de Latran, où jusqu’à aujourd’hui l’on conserve, avec la vénération qui leur est due, l’antiphonaire authentique, le lit de repos où il chantait et la férule dont il menaçait les enfans. Il divisa ses donations par séries prescrites, sous peine d’anathème, en vue d’assurer le service quotidien. »

Il faut avouer, et l’on n’a pas manqué de s’en prévaloir, que l’ouvrage de Jean Diacre fut écrit en un temps éloigné (deux siècles et