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la future Douma deux députés, ce ne seront vraiment plus deux représentans, puisque, au lieu d’être tous deux librement choisis par la ville, un de ces députés de la capitale polonaise devra être Russe et nommé par les résidens russes, autant dire par les fonctionnaires sous la direction du général gouverneur.

En Russie même, dans les pays foncièrement russes, de vraies capitales régionales, Kharkof, Kazan, Saratof, des villes parfois de 200 000 habitans, perdent tout représentant direct. Elles ne sont point, pour cela, dépouillées de tout droit de vote, mais les électeurs désignés par elles confondront leurs suffrages avec celui des représentans des campagnes du même gouvernement ; et comme, dans l’assemblée électorale commune, ces derniers seront de beaucoup les plus nombreux, le vote des électeurs urbains va se trouver, presque partout, noyé dans celui des campagnes. Il est vrai que, dans la plupart des provinces, un député devra être choisi parmi les délégués de la population urbaine ; mais au lieu d’être désigné par les villes elles-mêmes, ce député citadin sera élu par tous les électeurs de la province. De cette façon, dans la troisième Douma, plus encore que dans les deux premières, la majorité, — une majorité énorme, — sera aux ruraux, aux moujiks et aux pomechtchiks, aux anciens serfs et aux anciens seigneurs.

La loi de 1905 divisait les habitans des villes comme ceux des campagnes en plusieurs collèges qui choisissaient séparément, pour électeurs, des délégués, lesquels, réunis en assemblée générale, nommaient ensemble les députés. La loi de 1907 maintient cette organisation compliquée, avec la division des électeurs urbains du premier degré, selon le taux des impôts payés par eux, en deux curies inégales par le nombre et nommant le même nombre de délégués. La minorité riche composant la première curie pèsera ainsi aillant au scrutin que la majorité des petits contribuables, souvent dix ou quinze fois plus nombreux.

La loi de 1905 avait admis, sous la pression de la grève générale, qu’aucune catégorie d’habitans ne fût entièrement exclue du droit de vote. Les ouvriers, ceux de la grande industrie notamment, avaient reçu le droit de nommer un certain nombre d’électeurs qu’ils choisissaient par usine. Ce droit, la loi de 1907 ne le leur a pas enlevé, mais elle en a restreint l’usage ou la portée. Elle a décidé qu’à ces assemblées électorales ouvrières, le