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lors surtout qu’on n’osait céder au vœu des partis qui réclamaient le suffrage universel. A cet égard, la loi de 1907 n’est pas supérieure à celle de 1905. Elle en a du reste conservé les lignes générales. Elle a notamment maintenu le suffrage à plusieurs degrés qui, chez un peuple aussi primitif que le peuple russe, est assurément défendable, ne fût-ce qu’à titre transitoire. De même, la loi de 1907 a gardé le vote par classes, par groupes sociaux, par curies, comme on disait en Autriche. Les élections aux zemstvos ou assemblées provinciales fournissaient en Russie même un précédent. Il n’en est pas moins curieux de voir la Russie inaugurer l’ère constitutionnelle en adoptant et en adaptant à ses besoins ou à ses usages ce système des curies, à l’heure même où l’Autriche l’abandonne. En même temps que l’Autriche, la Russie a imité la Prusse, lui empruntant le système du partage des électeurs en plusieurs groupes, selon le taux de leurs impositions.

Ce qui a été le plus atteint, après les diverses oukraïnes, par la loi électorale du ministère Stolypine, ce sont les villes, c’est la population urbaine. Comme elle ne monte guère à plus de douze ou quinze pour cent de la population totale de l’Empire, il semble que le gouvernement n’ait pas grand intérêt à diminuer le nombre déjà restreint des représentans que lui avait accordés la loi de 1905. Les députés des villes ne pouvaient, en aucun cas, former la majorité de la Douma ; mais ils pouvaient fournir à la majorité des chefs et des cadres. C’est sans doute cette raison qui a décidé les auteurs de la révision de la loi électorale à enlever à la population urbaine une partie de ses représentans, en même temps qu’à modifier grandement le mode de suffrage dans les villes.

Aux deux premières Doumas, bien que le nombre des sièges octroyés aux électeurs urbains leur eût déjà été mesuré avec une défiante parcimonie, chacune des quinze ou vingt grandes villes de l’Empire était représentée, directement, par un ou plusieurs députés élus par ses habitans. A la troisième Douma, cinq villes seulement, Kief, Odessa, Varsovie, Lodz et Riga continueront, avec les deux capitales, à jouir de ce privilège, si pareil nom peut être donné au droit, pour les populations urbaines, de choisir elles-mêmes leurs députés, sans que leurs suffrages se confondent avec ceux des campagnes. Encore, si Varsovie, avec ses 800 000 habitans, conserve le droit d’envoyer à