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ENTRE DEUX RIVES

LA RUSSIE DEVANT LA TROISIÈME DOUMA

Il y a deux ans à peine que le manifeste impérial du 17 octobre promettait à la Russie un régime constitutionnel, et avant que ce régime, si nouveau pour elle, ait encore réellement fonctionné, elle en est déjà aux élections de sa troisième assemblée législative. Les deux premières ont siégé chacune quelques courtes semaines ; elles ont inauguré leur session, au palais de Tauride, avec la solennelle bénédiction du métropolite orthodoxe ; elles ont élu leur bureau, elles ont discuté leur règlement, elles ont nommé des commissions, elles ont entendu des discours éloquens et de vagues déclamations ; puis, sans qu’elles aient voté aucune loi (à la première, le gouvernement n’en avait même présenté aucune), elles ont été l’une et l’autre dissoutes par oukase impérial, et le pays a été invité à élire de nouveaux représentans. A quoi bon ? disent déjà quelques Russes et un plus grand nombre d’Occidentaux. L’expérience des deux premières Doumas d’Empire ne suffit-elle point ? N’ont-elles pas assez clairement montré que la Russie n’est pas faite pour le gouvernement des assemblées ? L’erreur du tsar Nicolas II a été d’avoir trop de confiance en son peuple, de lui permettre d’essayer du régime constitutionnel, alors que ni la nature, ni l’histoire ne l’ont préparé à un pareil régime. C’est l’autocratie qui a rassemblé la terre russe et créé la Russie, l’autocratie qui avec sa cohésion a fait sa grandeur et sa force : si elle veut rester une grande nation et un grand État, au lieu de