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suspensions de paiement qui ont aggravé la panique, bien qu’elles fussent assez rares et proportionnellement peu importantes.

Quelles sont les causes de la crise dont nous venons d’indiquer sommairement les manifestations ? Quels seront ses effets ? Quel enseignement se dégage de son observation ?


I

Dans le langage que les économistes ont emprunté, en grande partie, aux médecins, le mot crise désigne d’ordinaire le malaise qui résulte, pour les collectivités civilisées, d’une rupture d’équilibre entre les richesses présentes et les besoins ou mieux les ressources des consommateurs et qui se manifeste par une production intense, des transactions précipitées, des spéculations excessives alimentées par un crédit exagéré. D’où, en premier lieu, une hausse générale de tous les produits et de toutes les valeurs, puis une réaction violente, une baisse incoercible, des faillites, le découragement, la stagnation, le marasme.

De nombreux travaux ont été consacrés à la description de ce phénomène qui se renouvelle, avec une régularité curieuse, et sévit, presque au même moment, en Angleterre, en Allemagne, aux États-Unis, en France, partout en un mot, où l’industrie et le commerce ont atteint un grand développement.

Inutile de dire que l’Egypte ne réalise point cette condition. L’industrie n’y existe que dans les petits ateliers domestiques et tous les objets fabriqués y sont importés en échange des fruits du sol. On ne saurait donc parler d’une crise industrielle égyptienne. Le mal dont souffrent en ce moment Alexandrie et le Caire est simplement une de ces crises de bourse qui accompagnent d’ordinaire les crises de production, mais éclatent parfois à la suite d’excès d’agiotage sans être la conséquence d’une perturbation économique. Le krach des mines d’or, qui a détruit tant de fortunes à Paris en 1895, en est un exemple. C’est en outre, dans une mesure moindre, une crise financière comparable, en beaucoup plus petit, à celles qui ont ébranlé la République Argentine et l’Australie, il y a une quinzaine d’années. Les perturbations de ce genre ont été généralement dédaignées par les économistes qui ont étudié la question des crises et qui réservent ce mot aux suites d’une surproduction industrielle. Il peut y avoir aussi pourtant surproduction de titres de société ou d’effets