faut régler le droit de garde. C’est son intérêt, son intérêt seul que les juges considèrent pour le confier à l’an ou à l’autre des époux, ou même le refuser à tous les deux et le remettre à un tiers. Il n’est que trop évident que le divorce a porté à la force du mariage un coup terrible : il n’est pas moins certain qu’indirectement la puissance paternelle a été profondément atteinte : par l’effet du divorce elle s’est trouvée en conflit avec l’intérêt de l’enfant, et c’est cet intérêt qui l’a emporté. La garde a d’abord échappé au père contre qui le jugement était rendu. Puis les tribunaux ont décidé que la mère, quand elle a cette garde, est investie par là même du droit d’éducation. Enfin une loi de 1896 est allée plus loin : le Code civil disposait, pour le mariage de l’enfant, que la volonté du père était suffisante soit à l’autoriser, soit à le défendre, quel que fût l’avis de la mère : la loi de 1890 décide qu’en cas de divorce, c’est la mère investie du droit de garde qui peut seule autoriser ou défendre le mariage de l’enfant. Voilà donc aux mains de ce père divorcé la puissance paternelle réduite à peu près à néant, et cela par une évolution qui ne peut surprendre : fondée sur la dignité du père, elle avait pour but d’assurer à l’enfant la meilleure et la plus complète des protections : dès lors qu’elle ne donnait plus ce résultat, elle devait peu à peu s’affaiblir, disparaître. C’est ici la famille qui s’anéantit : il est naturel qu’avec elle se modifie gravement une institution qui était née d’elle.
Le développement de la vie industrielle a puissamment agi d’autre part au cours du XIXe siècle pour affaiblir le groupe familial et par suite pour isoler l’enfant ; ses effets ont atteint, non pas, comme l’individualisme et le divorce, un nombre assez restreint de parens, mais une classe tout entière. Nous n’avons rien vu d’équivalent à la croissance subite et démesurée des villes américaines ; cependant Saint-Etienne s’est créé en moins de trente ans ; Roubaix, Tourcoing, Fives-Lille ont crû d’un élan : la grande ville, l’énorme ville qui compte plus de cinq cent mille habitans, et Paris, qui dépasse deux millions et demi, ont imposé aussi des conditions nouvelles d’existence. Ces conditions sont bien connues : c’est un travail plus fiévreux, plus intelligent et qui épuise plus que celui de la petite ville ou de la campagne : c’est une existence plus animée, avec beaucoup plus d’apparent bien-être, la viande et l’alcool, les lumières et le mouvement de la rue ou du café. Le travail de l’usine entraîne