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et le Dauphin m’ont comblé de distinction sur le champ de bataille. Je remercie la main de Dieu ; je voudrais me rendre plus digne de ma chère Isabelska. J’embrasse les enfans.

« P.-S. — Ne vante pas ce que mon devoir m’a fait faire, attends que les autres le disent. »

Au-dessous, il y avait un dernier post-scriptum, de la main du secrétaire du comte de Lowendal :

« M. le maréchal a dit hautement que le Roi devait cette victoire au comte de Lowendal et à la brigade des Irlandais ; ce sont ses propres termes. »

M. Butin ne pense pas qu’en citant cette lettre, le duc de Broglie ait jamais cru que le succès final de Fontenoy pût être attribué exclusivement aux Irlandais. Il est facile, dit-il, de discerner, dans la relation du duc, les dévouemens qui, en se prodiguant, ont donné le temps à l’infanterie de se ressaisir, aux réserves d’entrer en ligne, à tous de finir la journée par un superbe et victorieux élan : ce sont nos vaillans escadrons qu’on voit s’ébranler, charger, mourir pour occuper, harceler, retarder l’ennemi jusqu’à ce que l’infanterie puisse intervenir.

Pour bien mettre en relief ce rôle brillant et décisif de notre cavalerie, M. Butin donne une description claire, circonstanciée de la bataille, nous faisant assister aux préparatifs, aux péripéties du début de la journée, à la formation et à la marche des Anglais pénétrant, comme un coin formidable, au milieu de notre infanterie rompue, démoralisée…

Que restait-il à faire aux Anglais pour fixer la victoire ? « A manœuvrer, » répond Frédéric le Grand, dans l’Histoire de mon temps.

A faire agir la cavalerie, déclare M. Butin : notre infanterie était mûre pour être chargée. Les escadrons anglais l’auraient achevée. Mais ces escadrons n’étaient pas en présence. Le duc de Cumberland les avait arrêtés, estimant que le terrain ne permettrait pas à la cavalerie de suivre l’infanterie.

La cavalerie française était là, heureusement. Le maréchal de Saxe courut à elle, et fit charger la première ligue. Nos vaillans régimens, — M. Butin donne tous leurs noms, depuis Royal-Roussillon, Royal-Cravattes… jusqu’à Clermont, régiment du Roi, Dragons d’Egmont, — s’ébranlent par escadrons qui se succèdent, se soutiennent et s’échelonnent.

Les premières charges sont menées avec entrain, avec fureur.