presque disparu, le froid est venu, nous sommes ici au milieu des neiges et nous allons rentrer dans quelques jours.
Je travaille beaucoup ici. Je me suis surtout occupé activement de me perfectionner dans la langue et je parle maintenant assez couramment. Je trouve un extrême intérêt dans mes entretiens journaliers avec les natifs et je suis loin d’en avoir aussi mauvaise opinion qu’on se plaît à le faire en Europe. Ce ne sont ni des anges, ni de parfaits honnêtes gens, mais ce ne sont pas non plus les monstres de perversité qu’on nous représente. Si cela vous intéresse, je vous parlerai quelque jour de ce côté de la question.
Je pense que vous avez reçu mes deux derniers volumes. C’est là, je le crains bien, que vous n’allez guère être content de moi. Dites-moi votre sentiment, je vous en prie. J’aime mieux que vous me traitiez mal que de ne pas me traiter du tout.
Souvenez-vous aussi, je vous prie, de mes désirs relativement à l’Académie, aussitôt que l’occasion s’en présentera. Il me semble que j’ai plus que jamais des titres au grade scientifique que je sollicite. Puissiez-vous être de cet avis ! On m’écrit de Paris beaucoup de choses obligeantes qui me donnent lieu de penser que ma nomination ne paraîtrait pas déplacée.
Comte A. DE GOBINEAU.
Tocqueville, le 13 novembre 1855.
J’ai reçu, il y a à peu près un mois, mon cher ami, la lettre que vous m’avez écrite de Téhéran le 7 de juillet. Je vous aurais répondu plus tôt, si j’avais su comment vous faire parvenir ma lettre. Mais je suis devenu, volontairement, si étranger à ce qui se passe dans la partie de notre planète que nous occupons, que j’ignore qui dirige aujourd’hui le service des dépêches au ministère des Affaires étrangères et que j’ai attendu que mon neveu qui, comme vous le savez, sans doute, est un peu de la boutique, vint me voir pour le charger de la présente missive.
J’étais inquiet de vous. Car, sans reproche, vous ne m’avez pas gâté en fait de nouvelles depuis votre départ de France et j’ai été obligé d’écrire à Vienne à votre ami de Serre pour savoir si vous n’étiez pas noyé dans la Mer-Rouge ou dans le golfe Persique. Votre lettre m’a entièrement rassuré. Le résultat que