on lui demandait son avis sur la réforme monétaire, sur le nouveau système des poids et mesures, sur la façon d’accorder l’ère républicaine avec l’ancien calendrier, et, quand la guerre éclata, sur la fonte des canons, sur la meilleure manière de fabriquer la poudre, sur la conservation de l’eau potable dans les navires, etc. ; et à chaque réponse qu’elle donnait, on la comblait de remerciemens et de félicitations. Il semblait bien que les services qu’elle rendait assuraient son existence.
Elle aussi pourtant n’avait pas été tout à fait épargnée par l’orage. En 1791, il parut un pamphlet intitulé : Les charlatans modernes, ou Lettres sur le charlatanisme académique. Il était surtout dirigé contre l’Académie des sciences, et signé du nom terrible de Marat. On sait que Marat était médecin de son état, médecin des gardes du corps du Comte d’Artois, — car il était dit que presque tous ceux qui renversèrent la royauté avaient été nourris et entretenus de ses pensions et de ses places ! — il s’était beaucoup occupé de recherches scientifiques ; il avait fait, ou cru faire, des découvertes, et les avait soumises à l’Académie, qui paraît bien les avoir d’abord approuvées[1]. Mais il est probable que dans la suite elle lui fut moins favorable, et que leurs relations se gâtèrent. Il continua pourtant, sans se décourager, ses travaux sur le feu, la lumière, l’électricité, et en 1788, au moment où les États Généraux allaient s’ouvrir, il publiait des Mémoires académiques ou nouvelles découvertes sur la lumière, relatives aux plus importans points de l’optique ; mais, comme cet ouvrage et les précédens ne lui paraissaient pas obtenir le succès qu’ils méritaient, et qu’il accusait de l’indifférence du public les injustices de l’Académie, il résolut de se venger, et exhala contre elle toutes ses rancunes dans un pamphlet violent. J’en citerai quelques phrases pour faire connaître de quelle façon il la traite : « Elle a pris, dit-il, pour symbole un soleil radieux et pour devise cette modeste épigraphe : Invenit et perfecit, non qu’elle ait jamais fait aucune découverte ou qu’elle ait jamais rien perfectionné, car il n’est sorti de son sein qu’une lourde collection de mémoires avortés, qui servent quelquefois à remplir un vide dans les grandes bibliothèques. En revanche, elle s’est assemblée 11 409 fois, elle a publié 380 éloges, elle a donné 3 965
- ↑ C’est au moins ce que semble prouver le titre d’un ouvrage qu’il a publié en 1779 : Découvertes sur le feu, l’électricité et la lumière constatées par une suite d’expériences nouvelles, vérifiées par les commissaires de l’Académie des Sciences.