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reprise et développée pour elle-même dans une conférence de Porrentruy, que l’orateur n’a pas eu le temps de rédiger, nous dit-on, mais dont on nous donne une rapide analyse, et dont le titre dit assez le sujet : la Réunion des Églises par le christianisme social. Évidemment, en Adèle disciple qu’il était de Bossuet, — et de Léon XIII, — cette noble idée de la « réunion » s’imposait de plus en plus à la pensée de Ferdinand Brunetière dans les dernières années de sa vie ; et tous ceux qui, au sein des diverses confessions, se passionnent pour cette idée et s’efforcent d’en hâter la réalisation, ont désormais le droit de l’enrôler dans leurs rangs.

Toutes ces préoccupations, et d’autres encore, ne le détournaient pas, comme on aurait pu craindre, de la critique littéraire. On en a la preuve, singulièrement éloquente, dans ce dernier volume d’Études critiques qu’il corrigeait au moment de mourir… Si l’on met à part un article, daté de 1904, sur Bourdaloue, et un autre, daté de 1905, sur les Transformations de la Langue française au XVIIIe siècle, tous les autres morceaux qui composent ce recueil sont de la dernière année de sa vie, — et il n’a pas tout recueilli. Cette simple constatation de fait est la meilleure réponse que l’on puisse faire à ceux qui ont prétendu, ou insinué, que la critique avait été pour Ferdinand Brunetière une occupation en quelque sorte provisoire et occasionnelle, et à laquelle il s’est dérobé dès qu’il l’a pu. La vérité est qu’il était né critique, comme il était né orateur ; et si parfois il a un peu négligé la critique, pour des besognes qu’il jugeait plus urgentes, il ne l’a d’abord jamais abandonnée complètement ; et ensuite, il y revenait toujours, dès qu’il le pouvait, avec un nouveau plaisir et une ardeur renouvelée. Au plus fort de ses campagnes oratoires, en pleine série d’études philosophiques ou religieuses, il s’interrompait pour écrire quelque article de pure littérature sur la Langue de Molière, par exemple, ou sur Corneille et le Théâtre espagnol. Il suivait toujours avec une attention passionnée le mouvement littéraire contemporain ; et, à défaut d’études complètement rédigées, que d’articles projetés, commencés même, ou simplement parlés, dans ce cabinet de la Revue, témoin, comme on l’a dit, de tant d’improvisations étincelantes ! « Il faut avoir une opinion ! » s’écrie-t-il quelque part ; et il avait une opinion motivée sur tous les livres importans qui paraissaient, et même sur beaucoup d’autres qu’il aurait fort bien pu se dispenser de lire. Il estimait du reste, — et ici moins que partout