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A ne pas donner aux ouvrières du travail à terminer chez elles le soir ;

À ne pas faire travailler le dimanche.

Ce sont là de beaux résultats que les années rendront encore plus nombreux et plus importans. Certains les trouveront modestes sans doute, qui ne songeront pas que la Ligue s’engageait sur un terrain où personne avant elle n’avait jamais pensé qu’on pût tenter une œuvre sociale. Un économiste a dit que le consommateur est roi dans l’ordre économique. Le consommateur ignore sa puissance, et il croit facilement que le fabricant et le marchand sont ses maîtres. La Ligue se charge de lui apprendre et ses droits et ses devoirs. Le jour où il les connaîtra et où il usera des premiers en même temps qu’il remplira les seconds, la question sociale avancera d’un grand pas.

La jeune fille n’a pas besoin seulement qu’on l’assiste dans son travail, afin que diminuent les misères matérielles de sa vie ; il faut encore la protéger contre des dangers, plus grands peut-être, qui menacent son innocence, son inexpérience et sa faiblesse. Le plus terrible de ces dangers se résume dans toute son horreur par une expression, la « traite des blanches, » aussi épouvantable que l’expression d’après laquelle elle a été formée : la traite des noirs. Il n’est pas de mon sujet de m’étendre longuement sur les moyens qu’ont employés les gouvernemens, après les protestations indignées des particuliers, pour réprimer cet odieux trafic. Pendant longtemps chez nous le code pénal ne pouvait l’atteindre, et les autres législations européennes étaient également insuffisantes. Il fallut tenir des congrès internationaux, — congrès de Londres en 1899, congrès de Paris en 1902, — pour que les différens États représentés prissent des mesures administratives. Une association se constitua à Paris sous la présidence de M. le sénateur Bérenger pour la répression de la traite des blanches et la préservation de la jeune fille. Les femmes, tout naturellement, furent au premier rang de ceux qui voulaient protéger la jeune fille. Les protestans avaient fondé, il y a plus de vingt ans, l’Œuvre des amies de la jeune fille, qui compte plus de 7 000 membres de trente pays divers, et dont l’action en France rayonne, par 83 comités, sur 75 départemens. En 1897, les catholiques fondèrent, à Fribourg