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consommateurs, de même Mmes Lerolle, Piot et Fagniez indiquent ce que doivent exiger les clientes pour que, dans les ateliers de blanchisserie, le travail soit plus régulier, et qu’il n’y ait pas le dimanche de travail supplémentaire.

L’utilité de ces enquêtes est bien évidente : on voit tout ce qu’elles apprennent à celles qui les mènent, à la Ligue et aux consommateurs. Mais la Ligue n’a pas seulement pour but de détruire une ignorance presque générale, elle veut encore encourager les patrons qui, dans leurs établissemens, respectent les lois sociales et augmenter leur nombre. Et ces patrons ou patronnes sont moins rares qu’on ne se le figure. Il suffit, disait Mme Jean Brunhes dans son rapport de 1903, de causer avec des patronnes sérieuses pour se rendre compte que le travail de la veillée est redouté par elles et quelles ne s’y résignent que contraintes par leur clientèle ; le travail de la veillée est un travail gâché : les doigts et les yeux des ouvrières sont trop fatigués le soir. Et bien souvent la cliente, qui a exigé sa robe pour le lendemain avant midi, est obligée de la renvoyer à la couturière. Ainsi deux ou trois heures de veillée auront été imposées à des jeunes filles, qu’on aura forcées à rentrer chez elles et à dîner vers onze heures du soir ou minuit, tout cela au bénéfice d’une cliente imprévoyante qui, par une revanche involontaire, mais juste, sera servie encore plus tard que si elle avait été moins pressée… — « On nous paye des heures supplémentaires, disait une ouvrière,… cela me fait 0 fr. 60 de plus, et, au bout de la période de presse, je suis si épuisée que les médicamens absorbent tous mes pauvres bénéfices… et davantage. » Mauvais calcul ! Et quant aux patrons qui avouent ne rien pouvoir, ils ajoutent presque tous que la clientèle seule peut les obliger à améliorer les conditions actuelles du travail. La Ligue a donc établi, comme la ligue américaine, une liste blanche où sont inscrits les noms des fournisseurs qui ont pris des engagemens conformes au type d’une bonne maison. Jusqu’ici elle a limité son action aux couturières et aux modistes. Et les couturières et les modistes inscrites sur la liste, dix-sept couturières, quatre tailleurs pour dames, trois corsetières et six modistes, se sont engagées :

À ne pas faire travailler normalement au-delà de sept heures du soir, et jamais au-delà de neuf heures du soir, même aux époques de presse ;