Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/645

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

entreprirent avec le secours de la Working Women’s Society une enquête sur la condition des caissières et vendeuses dans les magasins de détail de la ville[1]. Les résultats de l’enquête furent navrans, au point de vue tant de l’hygiène que du respect moral de l’individu. Ils furent signalés au public, il y eut un meeting de protestation contre les patrons, et on décida la formation d’un comité qui aiderait la Working Women’s Society à dresser la liste des magasins où les employés étaient traités avec justice. Ainsi l’action et l’opinion publique pourraient encourager l’employeur juste qui fait son devoir et donner à l’employeur juste, mais esclave de la concurrence, le moyen d’agir selon sa conscience. Une ligue, sous le nom de Consumer’s League, fut créée, dont le programme tenait dans ces quatre articles :

1° Il est dans l’intérêt de la communauté que tous les travailleurs reçoivent, non le salaire le plus bas, mais un salaire qui leur permette de vivre bien ;

2° C’est le consommateur qui porte la responsabilité des maux dont souffrent les salariés ; c’est lui qui persiste à acheter au meilleur marché, insouciant des conditions de ce bon marché ;

3° Le devoir du consommateur est donc de rechercher dans quelles conditions sont fabriqués les articles qu’il achète et d’exiger que ces conditions soient au moins morales et permettent au travailleur de vivre convenablement ;

4° Ce devoir revient principalement aux consommateurs qui usent des articles fabriqués par des femmes, étant donné qu’il n’est pas de minimum de salaire au-dessous duquel le salaire des femmes ne puisse être abaissé.

Des déclarations de principe on passa aussitôt à l’action effective. Les femmes américaines reconnaissant que, de fait, la plupart des employeurs sont virtuellement empêchés d’améliorer la condition des ouvriers quant au temps et au salaire, si l’opinion publique, la loi et l’action des consommateurs ne les soutiennent pas, déclarèrent que leur premier objet était d’améliorer la condition des femmes et des enfans employés pour la vente au détail dans les magasins de New-York, et annoncèrent

  1. Voyez l’Exemple des Américaines, par Mme Jean Brunhes, publication de la Ligue sociale d’acheteurs. Voyez aussi, dans la Quinzaine du 1er décembre 1904, un article de M. de Contenson sur le Devoir social de l’acheteur.