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a été plus directe et a abouti plus vite à la pratique parce que les universités ont joué un plus grand rôle dans l’ordre social que chez nous. J’excepte le moyen âge.

En acceptant ce point de vue, je crois qu’il y aurait utilité à feuilleter les écrits polémiques de Luther et d’Erasme et ceux de plusieurs de Jours contemporains, entre autres les espèces de pamphlets très curieux de Ulrich de Hutten, Epistolae aliquot obscurorum virorum, je ne sais si le titre est bien exact, je le cite de mémoire, mais sauf aliquot ce doit être cela. Au XVIIe siècle, il y aurait quelque chose à voir dans les écrits de Leibniz qui, très conservateur, comme on dirait aujourd’hui, n’en est pas moins occupé de combattre contre le mouvement des esprits, preuve qu’il existait. Au XVIIIe siècle, il y a Moïse Mendelssohn qui entrait dans la polémique sociale par les idées de réaction juive. C’est un grand esprit. Lessing est un vrai révolutionnaire ; la critique littéraire et le drame lui ont surtout servi d’armes.

Les biographies de Schiller et de Goethe, mais surtout de Schiller, peuvent fournir encore beaucoup de renseignemens et surtout ouvrir des points de vue sur l’état de la société allemande. Je me rappelle que Pierre Leroux dans sa préface à sa traduction de Werther doit parler de la nature révolutionnaire de ce héros de roman dont l’original vrai était, en effet, ce que Goethe l’a dépeint, un mécontent.

Je ne vous offre ceci que comme une avant-garde…

A. DE GOBINEAU.


Paris, ce 15 mai 1852.

Je suis fort en retard avec vous, mon cher ami ; les dix derniers jours viennent de se passer dans les ennuis et les embarras d’un déménagement, voilà mon excuse. J’ai cependant eu le temps de lire le chapitre de Flourens que j’ai trouvé dans la seconde édition de son livre intitulé : Histoire des travaux et des idées de Buffon, édition in-12, 1850, chap. 14, p. 199. Ce que j’ai à vous en dire sera court. Buffon et après lui Flourens croient à la diversité des races, mais à l’unité de l’espèce humaine. La seule raison qu’ils me paraissent en donner l’un et l’autre, c’est que toutes les races produisent entre elles d’une manière continue. Ce qui est, à ce qu’il paraît, pour les savans en histoire naturelle,