Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 40.djvu/603

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

être qu’un procédé de laboratoire, juste suffisant pour l’analyse des mouvemens dont on ne veut connaître que les caractères purement mécaniques ; elle est incapable de nous renseigner sur un phénomène un peu compliqué, les mouvemens d’un organe de machine, par exemple. Quant aux appareils à objectifs multiples, tels que celui de Muybridge, malgré leur supériorité sur la plaque fixe quand il s’agit de mouvemens d’ensemble, eux, aussi, sont insuffisans, et cela pour deux raisons : 1° les divers objectifs voient, pour ainsi dire, l’objet qu’ils ont à photographier sous des incidences différentes ; or, si ces changemens de perspective n’ont pas d’inconvénient quand on opère sur des objets très éloignés et de grandes dimensions, en revanche, ils rendraient impossible l’étude de ceux qui, vu leur petite taille, doivent s’observer de très près ; 2° par leur principe même, ils sont évidemment incapables d’enregistrer des, phénomènes d’une durée un peu longue. Trouver autre chose était donc de toute nécessité : c’est alors (1888) que vint à M. Marey l’idée, suggérée certainement par les télégraphes tels que celui de Morse ; d’un appareil constitué par un objectif braqué vers le sujet à étudier, et au foyer duquel un ruban ou, plutôt, une bande sensible passerait avec une vitesse suffisante, un obturateur mobile se chargeant de masquer l’objectif aux instans voulus. Du coup, le chronophotographe proprement dit, c’est-à-dire le chronophotographe à bande, un des instrumens les plus précieux que possède la science pour pénétrer les secrets de la nature, était imaginé.

Non seulement, en effet, la bande mobile a sur la plaque fixe l’immense avantage de permettre l’obtention d’un nombre d’images presque illimité, mais encore, comme il devient alors possible d’opérer devant un fond quelconque, les phénomènes les plus variés, mouvemens de la mer, des nuages, d’une foule, etc., peuvent être saisis avec la plus grande netteté et analysés avec la plus rare précision. En revanche, la réalisation de l’appareil est un problème de mécanique appliquée des plus délicats, car, le plus souvent, la bande sensibilisée doit défiler avec une extrême rapidité pour être capable de recevoir, en peu de temps, un grand nombre d’images, et, dans ces conditions, il est indispensable qu’elle s’arrête au moment de chaque pose, le calcul et l’expérience prouvant que, s’il n’en était pas ainsi, les images obtenues, même pour un temps de pose inférieur à