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Nous avons imité Syrinx au pied léger,
Et Daphné qu’Apollon pleura. Nul étranger
N’aura goûté le miel de notre chair fleurie.

Nous avons préféré comme époux le tombeau,
Car il nous a paru moins amer et plus beau
D’unir nos chastes corps à ton sol, ô patrie.


LE MARIN


Les vagues ont pleuré sur ta jeunesse brève,
Démétrios, toi qui partis joyeux et fort,
Toi qui n’es plus jamais revenu dans le port :
Quand le couchant fleurit, tu m’apparais en rêve.

Pâle et le front pensif, tu navigues sans trêve ;
Ton navire léger glisse dans l’air qui dort,
Tu sondes du regard l’abîme de la mort :
Tu ne reverras plus la maternelle grève.

Nous livrons vainement notre âme aux longs regrets ;
Un vent mystérieux a tendu tes agrès,
Et tu t’es envolé, voguant à pleines voiles,

Audacieux pilote, enfant trop cher aux dieux,
Et tu t’en es allé chercher d’autres étoiles
Plus haut que le soleil et plus loin que les cieux.


PERSÉPHONE


Du noir Hadès tu nous reviens, ô Perséphone,
Avec la première anémone,
Les premières fleurs d’amandier ;
Tu vas errer pensive et pâle au bord des grèves,
Semant tes rêves
Sur le sentier.

Dès que tu passes, tout renaît : le bois frissonne,
L’eau murmure, le pré bourdonne,