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C’est en pleurant la patrie,
Les vignes et la prairie
Où je marchais plein d’espoir
Qu’à travers les plaines mornes,
J’irai vers la mer sans bornes
Parmi les ombres du soir.


L’ABSENT


Que ne suis-je avec toi penchée au bord des eaux
Près d’un fleuve rapide ou de la mer sonore,
Et que ne puis-je à ton côté, jusqu’à l’aurore,
Mêler mes chants plaintifs à la voix des roseaux ?

Le soleil a jeté d’étincelans réseaux,
Faits de changeans rayons, sur les vagues qu’il dore
Avant de disparaître, et l’ombre que j’implore
Dans la forêt profonde assoupit les oiseaux.

La contrainte du jour a cessé… Voici l’heure
Où, libre de m’asseoir sous les treilles, je pleure
Voluptueusement en regardant les flots.

Oh ! que de soupirs pleins d’amertume et de charmes !
Depuis que tu partis, cruel, que de sanglots !
Mais l’amour n’est jamais rassasié de larmes.


LES MILÈSIENNES


Vierges et libres ; ô Milet, nous sommes mortes
Toutes les trois, dès l’aube heureuse de nos jours,
Pour dérober nos fronts sans tache aux jougs trop lourds
Des barbares vainqueurs, implacables cohortes.

Nous ne passerons plus en chantant sous tes portes :
A nos hymnes les dieux ne sont pas restés sourds ;
Mais, pour nous affranchir, grâces à leurs secours,
Nos faibles mains d’enfant surent être assez fortes.