bataille s’ensuivit où onze Grecs et huit Bulgares périrent. L’évêque, retrouvé le lendemain dans une maison à demi incendiée, fut arrêté sous l’inculpation d’avoir excité les Grecs à tirer sur les manifestans ; on ne tarda pas à le remettre en liberté. Le 7 août, les troubles commencèrent à Philippopoli ; une troupe de Bulgares se porta sur les écoles grecques qu’elle saccagea, détruisit les magasins grecs et, envahissant l’évêché grec, y installa de force l’évêque exarchiste ; un avocat grec, ayant tiré un coup de revolver et tué un Bulgare, fut lynché par la foule : on trouva chez lui, dit-on, des listes de souscriptions destinées à soutenir les bandes de Macédoine. Le lendemain, à Stanimaka, au sud de Philippopoli, il y eut des magasins pillés, des écoles saccagées, mais pas de mort d’homme. A Sofia, un meeting monstre réclama des mesures énergiques contre les Grecs. Nulle part les autorités n’intervinrent : le prince Ferdinand et M. Pelkof, ministre de l’Intérieur, étaient à ce moment à Marienbad ; les autorités locales n’agirent pas ou agirent trop tard, et leur action fut impuissante à arrêter les troubles, tant l’explosion du sentiment national et populaire avait été spontanée et violente. Dès l’arrivée du prince et du président du Conseil, des mesures sévères et efficaces furent prises pour empêcher le retour d’incidens aussi regrettables. Les troubles ont cessé, mais le gouvernement de Sofia a cru devoir prendre des précautions pour arrêter la propagande antibulgare en Roumélie : les écoles grecques ont été fermées en vertu d’une vieille loi de 1891, qui n’avait jamais été appliquée, comme contraire aux articles 4 et 5 du traité de Berlin qui accorde aux minorités grecques et turques, en Bulgarie, des garanties pour la sauvegarde de leur langue et de leur religion. Il a été décidé que les évêques patriarchistes ne seraient, à l’avenir, reconnus par le gouvernement que s’ils étaient sujets bulgares : on sait qu’il y a, dans la Principauté, quatre sièges épiscopaux grecs. Mais rien n’a pu calmer le ressentiment populaire : boycottés, molestés, ruinés, les négocians grecs quittent la Bulgarie et affluent à Athènes ; malgré les exhortations de leurs consuls et les efforts du gouvernement de Sofia, l’exode continue ; au mois de mai dernier le nombre des fugitifs était évalué à quinze mille et le gouvernement d’Athènes avait dû contracter un emprunt pour leur acheter des terres et les établir en Thessalie. Quelques-uns ne s’arrêtent qu’aux États-Unis.
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