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d’intervenir dans ce qui se passe « en territoire étranger sous la juridiction du patriarcat œcuménique qui est complètement autonome. » Il a reconnu cependant que « le gouvernement pouvait user de son autorité pour atténuer l’action des bandes, mais seulement à cette condition que le ralentissement de la défense ne serait pas suivi d’un développement de l’activité des ennemis de l’hellénisme. » Si, à leur tour, les Bulgares, les Serbes et les Roumains tenaient de semblables raisonnemens, le temps des massacres ne serait pas près de finir en Macédoine. La Grèce serait mieux inspirée, semble-t-il, de mesurer ses ambitions à ses forces, de renoncer à ses prétentions sur un pays où la domination turque n’est pas menacée et où d’ailleurs les Grecs, quoi qu’ils en disent, n’ont pas la majorité ; ils obtiendraient un meilleur succès en travaillant à restaurer l’hégémonie morale que la civilisation hellénique a eue en Orient et que les imprudences du gouvernement d’Athènes lui ont fait perdre.

La Grèce, qui n’a pas repris ses relations avec la Roumanie, a eu en même temps de graves difficultés avec la Bulgarie, et c’est encore à cause de la Macédoine. L’action des bandes grecques, le recul de l’exarchisme et l’afflux des fugitifs dans la Principauté ont provoqué dans toute la Bulgarie une irritation violente. En Roumélie, où habitent près de quatre-vingt mille Grecs, surtout aux environs de Varna et de Philippopoli, le mécontentement populaire devenait, l’été dernier, d’autant plus menaçant que les Grecs semblaient se plaire à l’exaspérer. Le journal du patriarcat œcuménique se répandait en propos agressifs contre le prince et le gouvernement bulgare, tandis que les Grecs établis dans la Principauté tenaient des meetings où ils affirmaient leurs sentimens antibulgares. La publication, par les journaux d’Athènes, d’une liste de Grecs condamnés à Salonique comme ayant fait partie des bandes, et dont plusieurs étaient mentionnés comme venus de Roumélie, mit le comble à l’irritation des Bulgares en leur donnant à croire que, sur leur territoire même, s’opérait le recrutement des bandes destinées à exterminer leurs frères de Macédoine. Les troubles commencèrent à Varna où la population prétendit empêcher le débarquement d’un évêque grec envoyé par le patriarcat pour occuper le siège de Varna. Ce mouvement continua à Anchialo ; les Grecs qui occupaient le monastère tirèrent sur les Bulgares qui manifestaient bruyamment leur hostilité à l’évêque patriarchiste ; une