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matière de cultes on ne légifère pas seul. Un homme de ce génie, puisqu’il voulait régler définitivement les questions ardues, ne pouvait que prendre le seul chemin qui s’ouvrit. Ici, le grand arbitre ne pouvait arbitrer seul. D’un geste, il appela à siéger avec lui, à ce tribunal de paix où déjà tant de causes avaient été si sagement jugées, le seul qui pût s’y asseoir à ses côtés : l’homme qui, aux yeux des catholiques, étant le Souverain Pontife, est aussi le souverain arbitre.

Alors, la paix ayant été rétablie dans le pays, paix dans la capitale hier troublée, paix dans les provinces déchirées, paix dans les champs de Vendée et paix dans les champs du Languedoc, paix dans les conseils du gouvernement, paix dans les partis tout à l’heure agités, paix dans le règlement des intérêts, paix dans les foyers, paix dans les salons, paix dans les consciences, l’arbitre se fit organisateur.

Laborieux à miracle, courbé de longues heures sur la tâche, y courbant les autres, tirant de chacun tout ce qui pouvait être mis au service du pays, excitant, gourmandant, encourageant ses serviteurs, leur prédisant aux heures où, « jetés dans un gouffre d’abus, » ils se démoralisaient, que « les beaux jours allaient venir, » fondant l’administration la plus extraordinaire que pays ait connue sur les ruines des « flasques administrations » d’avant Brumaire, restaurant partout l’ordre, rétablissant le crédit, codifiant le droit, il donna à la France cette satisfaction à laquelle avant tout elle avait aspiré en 1789 : une organisation. Lorsqu’elle avait réclamé une constitution, c’était celle-là. La liberté l’avait grisée ; devant les excès, elle s’en était déprise ; mais elle ne voulait point le retour au désordre ancien. Si, rétablissant l’ordre, « le despote ordonnateur » faisait régner la justice, elle faisait bon marché de la liberté.

L’arbitre avait, d’une main d’abord très légère, mais toujours très ferme, tranché les conflits qui divisaient la France, la déchiraient, allaient la perdre. La France se prit à renaître : dès la fin de 1800, elle semblait une convalescente : ayant touché de si près à la mort, elle jouissait de la vie avec délices. Elle adorait l’habile praticien qui l’avait guérie. Le voyant alors si simple dans sa grandeur, cette France généreuse lui donnait tout son cœur. L’historien nous dit cette popularité qu’aucune n’égala