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mômeries, et tout le monde criera : Vive la République ! » Ce jacobin avait raison. Si tous ses collègues ne l’écrivaient point, tous le pensaient. La République mourait plus particulièrement en 1799 de l’abominable régime où l’on tenait les cultes captifs.

La question religieuse dominait toutes les autres. La Constituante était ici la grande coupable. Entre deux solutions, conclure avec Rome un accord sur de nouvelles bases conformes à l’organisation que l’Assemblée donnait au pays, ou séparer purement et simplement de l’Etat l’Eglise laissée à la jouissance de ses biens et propriétés, les Constituans de 1790 en avaient choisi une troisième, la pire : créer une Eglise schismatique artificielle. Il fallait vraiment l’idéalisme insensé de ces hommes à système pour croire que, sans avoir consulté les catholiques, on pouvait par une loi les séparer de Rome et, partant, les dresser contre elle.

Un épiscopat avait été forgé de toutes pièces, et un corps ecclésiastique. Que ces prêtres ne fussent point tous méprisables, on en conviendra facilement en lisant les biographies que M. l’abbé Pisani vient précisément de grouper en un bien intéressant recueil. Il en était d’instruits, de généreux, de bien intentionnés, à côté de médiocres, de vils et de perfides : il en fut de courageux comme Grégoire, de misérables comme Gobel. Mais, si bons citoyens qu’on les supposât, si bons pasteurs qu’ils prétendissent être, ils n’étaient point de bons prêtres catholiques, puisqu’ils étaient en révolte contre Rome. Il n’est donc point étonnant que les fidèles, — justifiant par là leur nom, — se soient en immense majorité séparés d’eux. Les prêtres jureurs, méprisés, honnis, parfois pourchassés, restèrent cependant maîtres officiels de l’église : ils ne l’étaient point des âmes. Tout de même, ils en égarèrent quelques-unes et divisèrent les catholiques.

Les cultes civiques de la Raison et de l’Etre suprême, la religion théophilanthropique, le culte décadaire parurent autant de tentatives pour jeter hors des temples tout culte catholique. En vue de les favoriser et subsidiairement de liquider, à titre d’expédient financier, le budget des Cultes, la Convention à son déclin sépara l’Eglise de l’Etat. Il semblait que ce fût la mesure libératrice : si l’Etat ne reconnaissait aucun culte, le curé papiste acclamé par la majorité des fidèles devait reprendre possession du sanctuaire. Mais c’eût été trop demander à ce gouvernement tyrannique que dominaient d’ailleurs les haines de sectes, et, reconnaissons-le, des préoccupations plus légitimes. Le clergé