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catégorique de M. Carol, qui paraît si excessive à la plupart des Européens, administrateurs, journalistes, voyageurs ou colons, parce que, en somme, elle est l’aboutissement logique de leurs propres, opinions sur les Malgaches, qui, elles, étant modérées, ne leur paraissent point erronées et dangereuses, — comme elles sont en réalité.

Il importe de dégager les avis des personnalités compétentes sur les Hovas. L’opinion officielle s’affirme en son essence dans ce qu’elle a de contradictoire par ces deux phrases du Guide de l’immigrant à Madagascar, grande publication très soignée dont la direction a été confiée par le général Galliéni à M. Grandidier : « Dons naturels, caractère du pays, développement historique, tout a contribué à faire des Hovas le premier peuple de l’Ile… Ils semblent avoir en eux un germe de développement spontané qu’on chercherait vainement chez les autres peuples… » et : « Malgré leur bonne volonté, ils ont au fond peu d’aptitudes assimilatrices… Ils sont naturellement antipathiques. » Ces phrases trahissent le sentiment équivoque de l’administration supérieure qui est pleine à la fois de méfiance, d’irritabilité à l’endroit de ces « sujets, » si difficiles à saisir et à tenir, et de tendresse pour ces pupilles dont la souplesse d’esprit leur a fourni la raison de construire de magnifiques écoles, d’échafauder un système architectural d’instruction, d’administration, de politique ; l’éducation des Hovas a coûté très cher, et il est compréhensible qu’on ait de la complaisance à tirer tout d’eux. Seuls ils avaient un corps de fonctionnaires, et rien ne les rend plus propres à servir la bureaucratie française, dussent-ils l’éliminer ultérieurement. D’autre part, ce sont eux qui consomment le plus de produits métropolitains, élevant le total miroitant des importations, et rien encore ne peut mieux établir que les autres Malgaches leur sont inférieurs. De là cette proclamation de leur supériorité jusque dans l’ouvrage si solide et impartial de M. Gautier, qui conclut : « Dans les institutions Merina, ce qui frappe précisément, c’est leur puissance d’évolution spontanée… Les mêmes institutions qui, dans le reste de l’île, sont restées stationnaires, ou même ont rétrogradé vers un état politique et social inférieur, ont évolué en sens inverse dans l’Imérina. »

La capacité dévolution spontanée ne saurait être un signe absolu de supériorité ethnique. Celle des Hovas, tient moins qu’on