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le tenant pour un pays de climat meurtrier et d’insurrections constantes ; la réputation mauvaise qui lui en est restée a causé un tort économique considérable à la colonie en en détournant les gens sérieux et leurs capitaux, mais a été d’un grand profit pour les fonctionnaires. On a également calculé comme s’il était un pays riche capable de supporter toutes les majorations. Les traitemens actuels ne peuvent être légitimement conservés qu’à ceux qui, avec mérite, entretiennent une famille, foyer de peuplement. De même le régime actuel des congés, aggravé par une circulaire ministérielle de 1906, est excessivement dispendieux[1]. Enfin, en bureaucratie, des économies peuvent être réalisées par une décentralisation judicieuse.

Centralisation : centralisation économique, administrative, politique, voilà à quoi tend fondamentalement le régime français, non seulement par l’institution d’un gouverneur général à Tananarive, centre de l’île, mais par l’esprit même des administrateurs. Elle déterminera logiquement la reconstitution de l’hégémonie hova. Cette hégémonie, au début de la conquête, résultait systématiquement de la politique du protectorat qui, voulant administrer l’île à l’indigène, y employait partout la race, la plus intelligente. Dès que le général Galliéni fut convoqué à remplacer le Résident Laroche, il eut à lutter contre les Hovas que ce régime avait rendus puissans et insolens ; il comprit que, divisant pour régner, il fallait leur opposer les Betsiléos, les Betsimisarakas et les Sakalaves en les appelant dans leurs pays respectifs aux fonctions que les Hovas seuls y occupaient jusque-là : il inaugurait de la sorte son excellente politique des races, dont un des avantages a été d’imposer l’étude des populations des différentes provinces aux administrateurs ; et, en juillet 1897, tous les gouvernans hovas des côtes avaient été

  1. On accorde un voyage pour la France tous les deux ou trois ans, suivant les corps, et la plupart des passages sont de première classe. Une simple réduction de classe pour les fonctionnaires n’ayant pas atteint un grade assimilé A celui de commandant permettrait une économie de plusieurs centaines de mille francs. D’autre part, c’est un abus, reconnu tel par tous, d’accorder tous les deux ou trois ans des congés pour la France, avec un passage aussi onéreux ; une fois sur deux, ils pourraient être donnés pour les sanatoria voisins de la Réunion où toute l’année le climat est celui de la côte méditerranéenne et où les eaux minérales, très variées, sont peut-être supérieures à celles de France. Le général Galliéni avait fini par reconnaître, en 1905, le bien fondé de ce projet, qui mériterait d’être repris en considération par le Dr Augagneur. M. Saint-Germain a excellemment fait observer au Sénat, en 1900, que les crédits de passages avaient passé de 4 974 155 francs à 6 721 115, exigeant de la métropole des crédits supplémentaires.