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difficultés à obtenir un entretien : tantôt le Roi était souffrant, tantôt il ne voulait voir personne, tout son temps était absorbé par la difficulté que rencontrait la représentation du Rheingold. Au bout de trois jours d’attente, et au moment où Varnbühler lassé allait quitter la Bavière, il le fit enfin demander et s’efforça, par la grâce de son accueil, d’effacer ses procédés. Il parla longuement des soucis que lui causait son théâtre, exprima le regret qu’ils lui eussent fait négliger ses autres devoirs ; puis, abordant brusquement les affaires politiques, il dit : « Depuis l’entrevue de Nordlingen, vous exercez sur mon ministre-une action heureuse, et vous le maintenez dans une voie qui me satisfait, car elle est conforme aux intérêts de ma couronne. Vous l’avez aussi affermi dans une bonne ligne, quand vous vous êtes trouvé avec lui, à Berlin, lors de la dernière session du Parlement douanier ; j’espère qu’il continuera à en être ainsi. » Sans paraître s’apercevoir de l’étonnement produit chez Varnbühler par ces contre-vérités, il lui adressa plusieurs questions insidieuses : « Quelle opinion avez-vous de la capacité du prince Hohenlohe, de son aptitude aux affaires ? Que pensez-vous des sentimens prussiens qu’on lui attribue ? » Les réponses réservées, l’embarras de Varnbühler, ne l’arrêtèrent pas ; il continua à l’interroger, passant en revue tous les ministres et les principaux hommes politiques de Bavière. L’entretien dura plus d’une heure sur ce ton d’échappatoire, et Varnbühler s’en alla découragé. Le roi de Wurtemberg vint à son tour (28 octobre). Il conseilla plus vivement au Roi tic se rapprocher du parti conservateur, de vivre moins isolé, de se rendre populaire, de se séparer de Hohenlohe. Il manifesta ouvertement sa répugnance pour ce ministre en refusant d’assister à une de ses fêtes. Tout fut en pure perte.

Malgré le peu de succès de ces démarches, Varnbühler essaya encore une tentative après la défaite du ministère aux élections et pressa le ministre bavarois à Stuttgart de travailler au renvoi de Hohenlohe, « ce faible jouet des partis, ignorant, infatué, traître à son Roi, parjure à ses engagemens ; il faut absolument précipiter la chute de cet homme néfaste ; chaque jour perdu est une nouvelle blessure à l’autonomie du Sud[1]. » Il ne réussit pas plus que précédemment. Hohenlohe, il est vrai, donna sa

  1. De Saint-Vallier, 5 novembre 1869.